Phil Edwards (MDCM, promotion de 1936), médecin diplômé de McGill, fut le premier athlète mcgillois de race noire à participer aux Jeux olympiques. Athlète canadien de grand renom, il a remporté cinq médailles de bronze aux épreuves de demi-fond en trois participations aux Olympiques, ce qui lui a valu d’être surnommé « l’homme de bronze ».
D’origine guyanaise, Edwards s’est installé aux États-Unis pour étudier à l’Université de New York (NYU), où il a fait partie de l’équipe d’athlétisme. Ne pouvant être admis dans l’équipe olympique des États-Unis, en tant que sujet de l’Empire britannique il pouvait toutefois concourir pour l’équipe canadienne : l’entraîneur, qui avait reconnu son potentiel, l’a recruté sans tarder en 1927. En 1928, il a représenté le Canada aux Jeux d’Amsterdam, décrochant une médaille de bronze au relais 4 x 400 m.
Une fois diplômé de NYU, il a choisi d’étudier la médecine à McGill plutôt que de suivre les pas de son père en étudiant le droit à Cambridge, comme il le projetait. En arrivant à Montréal, en 1931, il se joint immédiatement à l’équipe d’athlétisme de l’Université, qu’il a menée à de nombreuses victoires en tant que capitaine. À Los Angeles, en 1932, il connut des Jeux extraordinaires avec l’équipe canadienne en remportant trois médailles de bronze : sa deuxième au relais 4 x 400 m, une à l’épreuve de 800 m et une autre à l’épreuve de 1 500 m.
Après cet exploit, il est nommé capitaine de l’équipe canadienne en vue des controversés Jeux de 1936 à Berlin. Aux côtés de l’étoile américaine de l’athlétisme Jesse Owens, il contredit à la face du monde les thèses racistes d’Adolf Hitler. Comme l’écrit la Gazette de Montréal dans son avis de décès en 1971, « la médaille de bronze de Phil Edwards au 800 m et sa cinquième place au 1 500 m à Berlin n’ont pas seulement amélioré le score général du Canada, mais a également fait passer l’athlète dans les rangs des athlètes noirs qui ont damé le pion à l’équipe d’athlétisme plus blanche que blanche d’Hitler dans son propre pays ». (Gazette de Montréal, 8 septembre 1971)
Malgré ce triomphe, Edwards a souvent été victime de racisme anti-noir. Lors d’un incident notoire, alors qu’il était sur le chemin du retour après les Jeux de Berlin, l’hôtel de Londres où il devait séjourner avec son équipe a refusé de lui donner une chambre parce qu’il était Noir. Le reste de l’équipe canadienne a alors annoncé que si le capitaine ne pouvait pas rester, toute l’équipe partait. On faisait régulièrement état de ses prouesses athlétiques dans les cahiers sportifs montréalais et canadiens, mais rarement omettait-on de mentionner la couleur de sa peau (« le nègre sombre » ou « vedette olympique canadienne de couleur ») en le couvrant d’éloges pour ses exploits.
Pendant 66 ans, le Dr Edwards a été l’athlète olympique canadien le plus décoré (le patineur de vitesse Marc Gagnon a égalé son record en 2002 et depuis les Jeux de 2021, la nageuse Penelope Oleksiak est la nouvelle détentrice du record avec un total de sept médailles remportées). Il a également reçu le premier trophée Lou Marsh décerné au meilleur athlète canadien, en 1936 (le plus récent récipiendaire de ce trophée est Laurent Duvernay-Tardif, joueur de football de la NFL et diplômé en médecine de McGill, comme le Dr Edwards). Le Dr Edwards a été intronisé au Panthéon des sports canadiens, au NYU Athletics Hall of Fame et au Temple de la renommée des sports de l’Université McGill.
Carrière en médecine
Le Dr Edwards a obtenu son doctorat en médecine MDCM en 1936, l’année de son triomphe olympique à Berlin, après quoi il a pris sa retraite de la course compétitive. Son grand frère, Edward « King » Edwards, a obtenu son diplôme de médecine la même année et faisait également partie de l’équipe d’athlétisme. (Dans l’album de fin d’études de McGill, à la catégorie « Ce qu’il déteste », King a répondu « Qu’on me prenne pour Phil ».) Leur petit frère Benjamin a aussi été sprinteur au sein de l’équipe d’athlétisme.
Après ses études, le Dr Edwards a quitté Montréal pour exercer à Trinidad pendant environ deux ans. Mais quand la guerre a éclaté, il s’est enrôlé dans l’armée canadienne, au sein du Service de santé royal canadien. Après la guerre, en 1945, il est revenu à McGill pour faire des études supérieures en médecine tropicale. Il est ensuite resté à Montréal, où il a mené une carrière remarquable dans le domaine des maladies tropicales en tant que spécialiste de la parasitologie et des maladies respiratoires comme la tuberculose, à l’Hôpital Royal Victoria.
Le Dr Edwards a aussi pris part à des missions humanitaires internationales. En 1960, juste après l’accession du Congo belge à l’indépendance, le Dr Edwards s’est joint à une mission de la Croix-Rouge de trois mois visant à remettre sur les rails le système de santé du pays après la fuite de ses médecins belges. Malgré des établissements d’enseignement à la fine pointe, il était interdit aux citoyens congolais noirs de faire des études en médecine et le Dr Edwards craignait qu’en raison du manque de personnel qualifié, le pays soit condamné à subir des épidémies de maladies évitables. « Le Congo belge était très en retard sur le plan des établissements d’enseignement pour les Congolais », a-t-il déclaré en entrevue à la Gazette de Montréal, en 1960. « C’est le nœud de toute la crise actuelle. »
Le Dr Edwards est décédé à Montréal, le 6 septembre 1971.