Des chercheurs de l’Hôpital de Montréal pour enfants a participé à une étude qui a permis de tester les nouveaux appareils sur une série de patients, y compris des bébés prématurés.
Même lors des consultations les plus courantes, les médecins écoutent les sons à l’intérieur du corps de leurs patients – l’air qui entre et sort des poumons, les battements du cœur et les aliments digérés qui progressent dans l’appareil digestif. Ces sons fournissent des informations précieuses sur la santé d’une personne. Et lorsque ces sons changent subtilement ou s’arrêtent carrément, cela peut signaler un problème grave qui justifie une intervention rapide.
Tel qu’annoncé par Northwestern University, des chercheurs ont développé de nouveaux dispositifs portables souples et miniaturisés capables d’aller bien au-delà des mesures épisodiques obtenues lors d’examens médicaux occasionnels. Doucement collés à la peau, les dispositifs suivent en continu ces sons subtils, simultanément et sans fil, en de multiples endroits de presque toutes les régions du corps, révèle leur étude publiée dans le journal Nature Medicine.
Les chercheurs ont testé les appareils sur 15 bébés prématurés souffrant de troubles respiratoires et intestinaux et sur 55 adultes, dont 20 souffrant de maladies pulmonaires chroniques. Non seulement les appareils ont donné des résultats d’une précision de niveau clinique, mais ils ont également offert de nouvelles fonctionnalités qui n’avaient jamais été développées ni introduites dans la recherche ou les soins cliniques.
« À l’heure actuelle, il n’existe aucune méthode de surveillance continue et de cartographie des sons corporels à domicile ou en milieu hospitalier », explique John A. Rogers, pionnier de la bioélectronique à Northwestern University, qui a dirigé le développement de l’appareil.
« Les médecins doivent placer un stéthoscope conventionnel ou numérique sur différentes parties de la poitrine et du dos pour écouter les poumons point par point. En étroite collaboration avec nos équipes cliniques, nous avons cherché à mettre au point une nouvelle stratégie pour surveiller les patients en temps réel, de manière continue et sans les inconvénients associés à une technologie rigide, câblée et encombrante. »
Surveillance discrète de la respiration des bébés
Les chercheurs ont développé les nouveaux dispositifs en ayant en tête deux groupes vulnérables : les bébés prématurés de l’Unité de soins intensifs néonatals (USIN) et les adultes ayant subi une intervention chirurgicale.
Particulièrement fréquentes chez les prématurés, les apnées sont une cause majeure d’hospitalisation prolongée, voire de décès. Lorsque les apnées se produisent, les nourrissons ne respirent pas (en raison de l’immaturité des centres respiratoires dans le cerveau) ou ont une obstruction des voies respiratoires qui restreint le flux d’air. Certains bébés peuvent même présenter une combinaison des deux. Pourtant, il n’existe actuellement aucune méthode permettant de surveiller en continu au chevet du patient le débit d’air et de distinguer avec précision les sous-types d’apnée, en particulier chez ces nourrissons plus vulnérables de l’USIN.
Dans le cadre d’études collaboratives menées à l’USIN de l’Hôpital de Montréal pour enfants, le personnel soignant a placé les dispositifs acoustiques sur les bébés juste en-dessous de la fourchette sternale, à la base de la gorge. Les appareils ont détecté avec succès le flux d’air et les mouvements thoraciques et ont pu estimer le degré d’obstruction du flux d’air avec une grande fiabilité, permettant ainsi l’identification et la classification de tous les sous-types d’apnée.
« Lorsque les dispositifs sont placés sous la fourchette sternale, on note une capacité accrue à détecter et classer les apnées, ce qui pourrait conduire à des soins plus ciblés et personnalisés, à de meilleurs résultats et à une réduction de la durée d’hospitalisation et des coûts », a déclaré le Dr Wissam Shalish, néonatologiste à l’Hôpital de Montréal pour enfants, scientifique junior au Programme en santé de l’enfant et en développement humain de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill, et co-premier auteur de l’étude.
« Lorsque le dispositif est placé sur le côté droit et gauche de la poitrine des bébés gravement malades, l’information transmise en temps réel pourrait rapidement alerter les cliniciens d’une éventuelle pathologie nécessitant une intervention immédiate chaque fois que l’entrée d’air est réduite d’un côté par rapport à l’autre. »
Suivi de la digestion du nourrisson
Chez les enfants et les nourrissons, les problèmes cardiorespiratoires et gastro-intestinaux sont les principales causes de décès au cours des cinq premières années de vie. Les problèmes gastro-intestinaux, en particulier, s’accompagnent d’une diminution des bruits intestinaux, qui pourrait être utilisée comme un signe d’alerte précoce de problèmes de digestion, de troubles intestinaux et d’obstructions potentielles. Dans le cadre de l’étude menée à l’USIN, les chercheurs ont donc utilisé les dispositifs pour surveiller ces bruits.
Les prématurés ont porté des capteurs à quatre endroits sur leur abdomen. Les résultats préliminaires ont été comparés à des mesures des mouvements intestinaux chez l’adulte effectuées à l’aide de systèmes filaires, ce qui constitue la norme actuelle en matière de soins.
« Lorsque les dispositifs sont placés sur l’abdomen, le fait de détecter automatiquement la diminution des bruits intestinaux pourrait alerter le clinicien de l’imminence d’une complication gastro-intestinale (parfois mortelle) », a mentionné le Dr Shalish. « Alors qu’une amélioration des bruits intestinaux pourrait indiquer des signes de récupération intestinale, en particulier après une chirurgie gastro-intestinale. »
En plus d’offrir une surveillance continue, les dispositifs ont également libéré les bébés de l’USIN des divers capteurs, fils et câbles connectés aux moniteurs à leur chevet.
Pour en savoir plus, lisez le communiqué de presse de Northwestern University.
À propos de l’étude
L’étude Wireless broadband acousto-mechanical sensors as body area networks for continuous physiological monitoring a été réalisée par Jae-Young Yoo, Seyong Oh, Wissam Shalish, Woo-Youl Maeng, Emily Cerier, Emily Jeanne, Myungkun Chung, Shasha Lv, Yunyun Wu, Seonggwang Yoo, Andreas Tzavelis, Jacob Trueb, Minsu Park, Hyoyoung Jeong, Efe Okunzuwa, Slobodanka Smilkova, Gyeongwu Kim, Junha Kimi Gooyoon Chung, Yoonseok Park, Anthony Banks, Shuai Xu, Guilherme M. Sant’Anna, Debra E. Weese-Mayer, Ankit Bharat et John A. Rogers.
https://doi.org/10.1038/s41591-023-02637-5
À propos de l’Hôpital de Montréal pour enfants
Fondé en 1904, l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME) est l’hôpital pédiatrique du Centre universitaire de santé McGill (CUSM). Premier hôpital du Québec à se consacrer entièrement aux soins des enfants, l’HME est un établissement d’enseignement et de recherche axé sur les soins de troisième et quatrième ligne aux nouveau-nés, aux enfants et aux adolescents de moins de 18 ans. L’HME dessert 63 % de la population géographique du Québec.
Grâce à ses installations de soins et de recherche pédiatriques adjacentes à l’établissement pour adultes du site Glen, l’HME est dans une position unique pour offrir des services et réaliser des études aux différentes étapes de la vie de ses patients. Le Centre de médecine innovatrice McConnell — seul centre de recherche clinique en milieu hospitalier en Amérique du Nord — permet à ses chercheurs de mener des essais cliniques sur le site de l’hôpital.
L’HME est un chef de file reconnu pour la prestation d’un vaste éventail de soins ultraspécialisés aux jeunes patients et à leurs familles de partout au Québec. L’hôpital est un centre provincial désigné de traumatologie reconnu pour la richesse de son expertise en cardiologie et en chirurgie cardiaque, en soins d’urgence, en neurologie et en neurochirurgie. hopitalpourenfants.com
À propos de l’IR-CUSM
L’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) est un centre de recherche de réputation mondiale dans le domaine des sciences biomédicales et de la santé. Établi à Montréal, au Canada, l’Institut, qui est affilié à la faculté de médecine de l’Université McGill, est l’organe de recherche du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) – dont le mandat consiste à se concentrer sur les soins complexes au sein de sa communauté. L’IR-CUSM compte plus de 460 chercheurs et près de 1 300 étudiants et stagiaires qui se consacrent à divers secteurs de la recherche fondamentale, de la recherche clinique et de la recherche en santé évaluative au site Glen et à l’Hôpital général de Montréal du CUSM. Ses installations de recherche offrent un environnement multidisciplinaire dynamique qui favorise la collaboration entre chercheurs et tire profit des découvertes destinées à améliorer la santé des patients tout au long de leur vie. L’IR-CUSM est soutenu en partie par le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS). ircusm.ca