Des parents et des jeunes orientent un réseau de recherche vers les besoins des enfants souffrant de handicaps liés au développement du cerveau

Source : Instituts de recherche en santé du Canada
Instituts de recherche en santé du Canada, La recherche en santé à l’œuvre, Rien pour nous sans nous http://www.cihr-irsc.gc.ca/f/51263.html 2018.  Tous droits réservés. Reproduit avec la permission des Institut de recherche en santé du Canada, 2018. 

Maya Pajevic

Maya Pajevic est une amatrice de sensations fortes et une rebelle.

Cette étudiante universitaire de Calgary âgée de 22 ans pratique le saut à l’élastique, le parachutisme et le deltaplane. Elle adore voyager, skier et se balader en tandem avec ses amis.

Elle vit aussi avec un handicap.

Le soir du 17 août 2002, à l’âge de 6 ans, Maya a été terrassée par un grave accident vasculaire cérébral après avoir reçu un diagnostic de diabète de type 1. Durant son hospitalisation, les médecins ont aussi découvert dans son cœur deux caillots potentiellement mortels qui devaient être retirés par une opération à cœur ouvert.

Les médecins ont prévenu ses parents que si elle survivait, elle serait sévèrement déficiente. Elle serait dépendante des autres pour ses besoins de base et ne pourrait jamais parler, marcher, mastiquer, déglutir ou communiquer. Elle aurait des difficultés d’apprentissage, et sa scolarisation serait problématique.

Aujourd’hui, presque 16 ans plus tard, Maya est non seulement vivante, mais rayonnante.

Elle réussit à composer avec les séquelles de sa mésaventure médicale. Elle doit surveiller son alimentation. Elle a conservé seulement 10 % de sa sensibilité du côté droit et perd facilement l’équilibre. Elle ne peut plus se servir de son bras droit pour des tâches exigeant une motricité fine. Elle est un peu plus lente à comprendre la documentation spécialisée.

Ces séquelles n’ont pas empêché Maya de poursuivre des études de premier cycle en sociologie avec double mineure en innovation sociale et en innovation et entrepreneuriat à l’Université Mount Royal.

Parallèlement à ses études, Maya a été conseillère auprès des patients et partenaire d’organismes de soins de santé pendant de nombreuses années. Elle deviendra stagiaire au Design Lab d’Alberta Health Services où l’on fait appel à la pensée créatrice et à la résolution créative de problèmes pour améliorer les services de santé. Maya se joint à l’équipe à titre d’utilisatrice et contribue ainsi à la qualité du processus de création.

« Je me définirais comme une rebelle », déclare Maya. « Je pense qu’il est important de remettre en question le statu quo, et j’espère que les patients n’acceptent pas passivement les services de santé – qu’ils osent demander « pourquoi » ou « pourquoi pas » dans leurs rapports avec le système de santé. »

Cet esprit rebelle est mis à profit dans son nouveau rôle de membre du Conseil consultatif national des jeunesdu Réseau BRILLEnfant, un des réseaux pancanadiens financés par les IRSC et leurs partenaires dans le cadre de la Stratégie de recherche axée sur le patient.

Le Réseau BRILLEnfant se consacre à défendre les droits d’un des groupes les plus vulnérables de la société canadienne : les enfants souffrant d’un handicap lié au développement du cerveau.

« Cette initiative montre que les personnes handicapées ont une voix, et que leur expérience de partenariat avec le système peut aider à créer un environnement dans lequel les enfants handicapés peuvent prospérer », dit Maya. « Cela prouve que les jeunes ont des idées et qu’ils veulent être des agents de changement ».

En tant que membre du Conseil consultatif des jeunes du Réseau BRILLEnfant, Maya espère apprendre comment se fait la recherche et comment ses résultats se rendent aux patients et influent sur leur expérience.

Au Canada, jusqu’à 850 000 enfants de moins de 14 ans vivent avec un handicap lié au développement du cerveau, comme la paralysie cérébrale et le trouble du spectre autistique.

« Nous avons pour but d’aider les enfants à réaliser leur potentiel, de mieux soutenir leurs familles et de rendre nos sociétés plus inclusives », explique la Dre Annette Majnemer, chercheuse principale désignée et codirectrice scientifique du Réseau BRILLEnfant.

Dre Annette Majnemer (troisième à partir de la droite) et des membres de son équipe à la Conférence sur la SRAP 2018

Pour y arriver, la Dre Majnemer et son équipe de recherche pancanadienne traitent les jeunes handicapés et leurs familles comme membres à part entière du Réseau BRILLEnfant.

« Notre réseau est entièrement bâti autour des priorités de recherche définies par les jeunes handicapés et leurs parents ainsi que par une gamme d’intervenants travaillant dans le domaine des troubles du développement cérébral comme des cliniciens, des responsables des politiques, des chercheurs et des administrateurs des soins de santé », souligne la Dre Majnemer. « Le Conseil consultatif national des jeunes est un autre mécanisme créé pour s’assurer que les jeunes continuent d’avoir un grand mot à dire dans nos activités. »

Frank Gavin (deuxième à partir de la droite) and des membres du Conseil consultatif national des jeunes

« Rien pour nous sans nous » est la philosophie qui guide le réseau. Cela signifie que l’engagement des citoyens – par la participation des jeunes vivant avec un handicap lié au développement du cerveau et/ou les représentants de leurs familles lorsqu’ils ne peuvent défendre leurs intérêts – oriente toutes les priorités du réseau et en constitue la pierre angulaire.

Le Conseil des jeunes se veut complémentaire à l’actuel conseil d’engagement des citoyens du Réseau BRILLEnfant. Ces deux entités permettent aux jeunes et à leurs parents d’influer sur toutes les questions qui les concernent.

« Au départ, il a fallu déterminer comment nous allions collaborer avec les jeunes et comment les jeunes allaient collaborer avec les chercheurs et les fournisseurs de soins dans le réseau », explique Frank Gavin, directeur de l’engagement des citoyens et président du conseil d’engagement des citoyens du Réseau BRILLEnfant.

« En même temps, nous voulons promouvoir l’inclusion et la réciprocité. Nous voulons aussi favoriser des échanges actifs, réfléchis et productifs. Enfin, nous voulons donner du pouvoir à ces jeunes extraordinaires et les aider à servir d’agents de changement, non seulement en recherche, mais aussi dans la société en général. »

Maya figure parmi les six jeunes exceptionnels qui siègent au Conseil des jeunes. L’objectif consiste à recruter jusqu’à dix membres représentant différents âges, handicaps et coins du pays. Les membres décident eux-mêmes de leur mode de fonctionnement, y compris du moment, de la fréquence et du format de leurs réunions.

Le Conseil des jeunes donnera son avis sur des questions comme le recrutement de jeunes dans les programmes de recherche et les méthodes de communication qui plaisent aux jeunes. Les membres auront la possibilité de poser les questions qui les intéressent et de recevoir de la formation pour développer les connaissances et les compétences qui leur permettront de collaborer pleinement à la recherche.

Le Réseau BRILLEnfant se consacre à défendre les droits d’un des groupes les plus vulnérables de la société canadienne : les enfants souffrant d’un handicap lié au développement du cerveau.

Pour avoir un impact, les résultats de la recherche doivent être transmis aux personnes qui peuvent s’en servir, dans un format qui en facilite la compréhension et l’application.

Le Réseau BRILLEnfant est un chef de file dans la conception de solutions innovatrices et pratiques à des problèmes du monde réel.

La Dre Keiko Shikako-Thomas montre l’application Jooay

Une de ces solutions est Jooay, une appli mobile et Web gratuite qui aide les enfants handicapés et leurs familles à trouver des activités de loisir possibles dans leur secteur. L’appli contient une base de données couvrant les arts, les sports, les camps et d’autres programmes d’activités de loisir partout au pays.

Jooay est aussi conçue pour favoriser la création d’une communauté de parents, de professionnels de la réadaptation et d’enseignants qui peuvent utiliser l’appli pour rester en contact, échanger, apprendre les uns des autres et se renseigner sur les politiques appuyant les loisirs et la recherche.

La Dre Keiko Shikako-Thomas  et la Dre Majnemer ont créé Jooay en collaboration avec des parents, des professionnels de la réadaptation, des responsables des politiques, des éducateurs physiques et des partenaires communautaires.

« Nous savions que les parents utilisent leur téléphone intelligent pour chercher de l’information et organiser leur vie. La création d’une appli nous a donc semblé un moyen innovateur et efficace de mettre les parents en contact et de leur fournir de l’information sur l’offre de programmes de loisirs adaptés à leurs enfants n’importe où au Canada », explique la Dre Shikako-Thomas, qui est ergothérapeute, chercheuse sur les handicaps touchant les enfants, et coresponsable de l’application des connaissances pour le Réseau BRILLEnfant.

L’appli Jooay, dont il existe maintenant une version 2.0, compte plus de 1 700 utilisateurs et près de 2 000 activités recensées dans les dix provinces. Elle fait l’objet de commentaires positifs de la part des partenaires communautaires et autres.

Robert Simpson, un éducateur physique dans une école pour enfants handicapés de Montréal, déclare que « Jooay a complètement changé la donne! À toutes mes rencontres avec les parents, je leur montre cette appli qui les aide à trouver des activités adaptées à leurs enfants dans le secteur où ils habitent, pour que les jeunes puissent demeurer actifs en dehors des heures de classe. »

En plus de faire le pont entre les familles et la recherche qui peut faciliter leur quotidien, le Réseau BRILLEnfant aide les parents à servir d’agents de changement en les mettant en contact avec des responsables des politiques et à participer au dialogue appuyant la prise de décisions fondées sur des données probantes.

« Par le biais de nos programmes de recherche, nous faisons la promotion des droits fondamentaux des enfants handicapés, comme le droit à la santé, le droit de grandir dans un milieu bienveillant et le droit au jeu », souligne la Dre Shikako-Thomas.

Rachel Martens, Dre Keiko Shikako-Thomas, Susan Cosgrove et son fils Liam aux Nations Unies

Par exemple, en juin dernier, la Dre Shikako-Thomas a amené deux parents et un enfant – Rachel Martens, Susan Cosgrove et son fils Liam âgé de 15 ans – au siège des Nations Unies à New York en tant que membres de la délégation canadienne à la 11e Conférence des parties signataires de la Convention sur les droits des personnes handicapées. Le Canada est l’un des 177 pays signataires.

Susan a participé à l’événement en tant que parent-mentor du Réseau BRILLEnfant, et Rachel en tant que parent-ambassadeur du projet Jooay. Liam présente un trouble du spectre de l’autisme. Ensemble, ils sont devenus des défenseurs et des porte-parole des enfants handicapés et de leurs familles. Aux Nations-Unies, Rachel, Susan et Liam ont exprimé leurs opinions sur les droits de la personne, tandis que la Dre Shikako-Thomas et Jonathan Lai, boursier postdoctoral au sein du Réseau BRILLEnfant, ont présenté un exposé avec des représentants du gouvernement canadien sur l’approche du Canada à l’endroit des personnes handicapées, qui est axée sur leurs droits.

Dans une entrée de blogue (en anglais seulement), Susan décrit combien Liam et elle étaient excités d’avoir la chance d’interagir avec des leaders mondiaux, de rencontrer d’autres familles et de représenter leur communauté. « En tissant des liens avec d’autres familles vivant avec un handicap, nous créons un front commun plus solide qui peut mieux se faire entendre. Lorsque les parents…ont la possibilité de parler pour notre communauté, nous pouvons ressentir toute la force des familles canadiennes et sommes honorés d’en être les représentants », écrit Susan.

En travaillant avec des jeunes et des familles comme celles de Susan, de Maya, de Rachel et de nombreuses autres, le Réseau BRILLEnfant contribue à garantir que les droits des enfants handicapés au Canada ne soient pas éclipsés par les droits des personnes handicapées et les droits des enfants, de sorte que tous les enfants, handicapés ou non, puissent aspirer à un brillant avenir.

 

Le 12 décembre 2018