Chers membres de la collectivité mcgilloise,
Bon nombre d’entre vous m’ont posé des questions en rapport aux récentes allégations au sujet de l’Université McGill et de l’industrie de l’amiante. Par la présente, j’aimerais éclaircir certains points à ce sujet et vous informer des mesures que prend la Faculté à cet effet.
Les allégations mises de l’avant dans les médias indiquant que les travaux de recherche de l’un de nos professeurs émérites à la retraite, le Pr J. Corbett McDonald, aient pu être influencés par l’industrie de l’amiante sont très sérieuses et doivent être abordées. La recherche est au cœur de la mission de l’Université McGill. Ses chercheurs sont tenus de mener leurs travaux dans le respect des normes éthiques les plus élevées qui soient. Par conséquent, à la suite d’un documentaire récemment diffusé sur la chaîne CBC et dans une lettre envoyée au chancelier, à la principale et au président du Conseil des gouverneurs de l’Université McGill, la Faculté de médecine a amorcé un rapport préliminaire sur les travaux du Pr McDonald. Dirigé par la Pre Rebecca Fuhrer, directrice du Département d’épidémiologie, de biostatistique et de santé au travail, et titulaire d’une chaire de recherche du Canada, ce rapport vise à certifier que les travaux du Pr McDonald ont été menés conformément aux rigoureuses normes scientifiques qui font la réputation de McGill. C’est à la lumière des résultats colligés par la Pre Fuhrer que l’on déterminera s’il est nécessaire de procéder à une enquête plus approfondie, conformément à nos normes en matière de politiques et de procédures. Je diffuserai les résultats de l’enquête de la Pre Fuhrer dès qu’ils seront disponibles.
Sans risquer de nuire au rapport de la Pre Fuhrer, j’aimerais fournir quelques repères quant au contexte où le Pr McDonald a entrepris ses travaux. Dès 1966, de concert avec une équipe de chercheurs, le Pr J. Corbett McDonald a amorcé une vaste étude épidémiologique sur le décès d’environ 11 000 travailleurs québécois des secteurs de l’exploitation et du traitement du chrysotile, une fibre d’amiante. De 1971 à 1998, le Pr McDonald et ses collègues ont publié les résultats de leurs travaux dans le cadre d’une série d’articles parus dans des publications internationales évaluées par un comité de lecture. Leurs travaux ont en partie été financés par l’Institut de santé au travail et environnementale de l’Association des mines d’amiante du Québec, ce que le Pr McDonald a clairement indiqué dans ses articles.
Le documentaire de la CBC mentionne que « les études scientifiques réalisées par le Pr McDonald suggèrent que d’autres facteurs pourraient être en cause dans le cas de cancers diagnostiqués chez des travailleurs québécois de l’amiante ». Le Pr McDonald a indiqué que les risques de santé liés au chrysotile d’amiante pourraient être réduits de manière importante par une diminution de l’exposition, et que les risques associés au chrysotile étaient de beaucoup inférieurs à ceux d’autres fibres d’amiante. Néanmoins, les travaux du Pr McDonald démontrent un lien clair entre le taux de décès élevé et le niveau d’exposition à l’amiante auquel les 11 000 travailleurs ont été soumis au cours des années où ils ont occupé cet emploi. Par conséquent, le Pr McDonald soutient que l’amiante et le chrysotile d’amiante sont des carcinogènes associés à la fois au cancer du poumon et au mésothéliome. Bien que le documentaire de la chaîne CBC ait jeté un doute au sujet du Pr McDonald, ce dernier est toutefois largement reconnu pour ses travaux précurseurs ayant permis de démontrer les risques de santé liés à l’amiante. Dans ses monographies sur l’amiante qu’elle a fait paraître en 2011, l’Organisation mondiale de la Santé citait les recherches du Pr McDonald.
S’il est vrai que J. Corbett McDonald a tiré des conclusions différentes de la plupart des autorités à l’heure actuelle, la présentation d’arguments scientifiques divergents ne constitue pas une faute disciplinaire. L’Organisation mondiale de la Santé reconnaît également, dans les monographies qu’elle a publiées en 2011, que la question des risques de santé associés au chrysotile continue de prêter à controverse.
Aucun projet de recherche mené actuellement à l’Université McGill n’est financé par l’industrie de l’amiante.
16 février 2012