Si notre héritage futur est formé des traces que nous laissons derrière nous, il va sans dire que le Dr Christopher Mushquash (en anglais seulement) se forge un héritage considérable. En effet, il jette actuellement les bases d’une véritable transformation de la santé mentale des Autochtones au Canada.

« C’est un devoir pour moi de me rallier aux nombreuses personnes qui œuvrent non seulement à défendre les intérêts des jeunes autochtones et à améliorer leur mieux-être, mais aussi à faire en sorte que nos communautés et cultures ne soient jamais laissées pour compte », explique-t-il.

Psychologue clinicien agréé, le Dr Mushquash est également titulaire de la chaire de recherche du Canada en santé mentale et en toxicomanie chez les Autochtones, professeur de psychologie à l’Université Lakehead (en anglais seulement) et à l’École de médecine du Nord de l’Ontario, directeur du Centre de recherche en santé dans les milieux ruraux et du Nord (en anglais seulement) de l’Université Lakehead, vice-président à la recherche au Centre régional des sciences de la santé de Thunder Bay et scientifique en chef à l’Institut de recherche régional en santé de Thunder Bay (en anglais seulement).

Le Dr Mushquash est animé par une passion bien ancrée dans ses racines et savoirs culturels, qui lui viennent de ses origines ojibwées et de son appartenance à la Première Nation de Pays Plat (en anglais seulement) (située à environ 175 kilomètres au nord-est de Thunder Bay).

« J’ai grandi dans une communauté rurale au nord-est de l’Ontario. Bien que j’y aie vécu une belle enfance en pleine nature, les problèmes de santé mentale et de consommation étaient bien présents, raconte-t-il. Ils n’étaient pas hypothétiques, bien au contraire. Cette expérience m’a amené à mieux comprendre l’évolution de ces problèmes et les éléments nécessaires à leur résolution. C’est pourquoi j’ai dévoué une si grande partie de ma vie à aider la jeunesse autochtone. »

Améliorer l’équité en santé dans les communautés autochtones

Son projet le plus récent, Developing context-specific and culturally relevant wise practices for transforming youth mental health services in Indigenous contexts [Des pratiques judicieuses et adaptées au contexte et à la culture pour transformer les services de santé mentale offerts aux jeunes autochtones], est financé par les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) par l’intermédiaire de l’initiative Réseau de réseaux – Services intégrés pour les jeunes (RR-SIJ). À titre de cochercheurs principaux, Christopher Mushquash et Srividya Iyer, professeure au Département de psychiatrie de l’Université McGill, dirigent une équipe de chercheurs en collaboration avec le Conseil autochtone d’ACCESS Esprits ouverts, initiative lancée en 2014 qui, à l’époque, était à l’avant-garde de l’étude des services intégrés pour les jeunes (SIJ), qui se veulent un guichet unique de services de soutien offerts aux jeunes du Canada. Le Conseil autochtone est composé de parties prenantes issues des six communautés autochtones partenaires : la Première Nation d’Elsipogtog (Nouveau-Brunswick), la Première Nation d’Eskasoni (Nouvelle-Écosse), la Première Nation de Sturgeon Lake (Saskatchewan), Puvirnituq (Nunavik [Québec]), Aaschihkuwaataauch (Mistissini [Québec]) et Ulukhaktok (Région désignée des Inuvialuit [Territoires du Nord-Ouest]).

L’équipe dirigée par les Drs Mushquash et Iyer examinera la prestation des services de santé mentale destinés aux jeunes dans des dizaines de communautés autochtones d’un océan à l’autre. Elle étudiera ensuite les données recueillies et formulera des recommandations (en consultation avec des jeunes, des familles et des parties prenantes) sur les façons de transposer ces services de mieux-être efficaces dans les centres de SIJ partout au Canada afin d’aider davantage de jeunes autochtones.

« Notre objectif n’est pas une refonte du système. Nous souhaitons plutôt cerner les pratiques qui aident la jeunesse autochtone et les diffuser à plus grande échelle », précise le Dr Mushquash.

« Les groupes autochtones au Canada sont loin d’être homogènes. En effet, nous parlons des langues différentes et n’avons pas nécessairement les mêmes pratiques culturelles et croyances spirituelles. Nous avons toutefois une histoire commune : celle du colonialisme, de la rupture du lien avec la terre et des pensionnats. Nos communautés sont également confrontées à des problèmes semblables au chapitre de la santé mentale et des dépendances. »

Le chercheur explique que les traitements et les solutions efficaces dans une partie du pays pourraient bénéficier à des jeunes se trouvant à des milliers de kilomètres. « Rien n’empêche différentes régions d’échanger des pratiques exemplaires : une mesure implantée à Thunder Bay pour réduire le nombre de jeunes en situation de logement précaire pourrait aussi être adoptée au Yukon. Il s’agit d’un bel exemple de mise en commun que notre projet favorisera. »

Miser sur l’amélioration continue

Ce projet alimentera un système de santé apprenant, qui repose sur une collecte de données intégrée. Autrement dit, une équipe de chercheurs et de scientifiques, comme le Dr Mushquash, étudient toutes sortes de services de mieux-être pour les jeunes, allant du soutien en santé mentale aux programmes travail-études en passant par le soutien par les pairs, afin de dégager les traitements et formes de soutien les plus efficaces ainsi que les raisons de leur efficacité. Les données ainsi recueillies sont ensuite utilisées pour personnaliser et améliorer les traitements et les services offerts dans les centres de SIJ partout au pays.

« Deux principes sont à retenir : non seulement les jeunes méritent de bien aller et d’avoir accès à des traitements de première qualité, mais il faut aussi les écouter pour connaître précisément leurs besoins. Ce n’est qu’en adoptant ces deux principes que nous parviendrons à mettre en place un véritable système de santé apprenant. »

Pour le Dr Mushquash, il ne fait aucun doute qu’un investissement dans la recherche dirigée par les Autochtones, c’est un investissement dans le futur de la jeunesse canadienne.

« Les communautés des Premières Nations, des Inuits et des Métis sont extrêmement prometteuses et résilientes, et pleines d’espoir, ajoute-t-il. Les jeunes autochtones, comme tous les autres jeunes d’ailleurs, doivent recevoir du soutien lorsqu’ils en ont besoin afin de s’épanouir et de pleinement profiter de la vie. Il est de notre responsabilité de veiller à ce que le soutien en question soit bel et bien fourni. »