Des chercheurs découvrent un mécanisme moléculaire qui permet au corps d’ajuster les rythmes circadiens

sleeplessUne équipe internationale de chercheurs a découvert l’équivalent moléculaire d’un bouton pour remettre à l’heure l’horloge interne du corps. Cette découverte pourrait constituer une cible prometteuse pour le traitement d’un large éventail de maladies, allant des troubles du sommeil à d’autres anomalies comportementales, cognitives et métaboliques souvent associées au décalage horaire, au travail par quarts et à l’exposition à la lumière pendant la nuit, ainsi qu’à des troubles neuropsychiatriques comme la dépression et l’autisme.

Dans un article publié en ligne le 27 avril 2015 dans la revue scientifique Nature Neuroscience, les auteurs, dirigés par des chercheurs des universités McGill et Concordia, à Montréal, indiquent que la combinaison d’un phosphate et d’une protéine clé du cerveau permet de réinitialiser l’horloge interne du corps. Ce processus, appelé phosphorylation, est déclenché par la lumière. En fait, la lumière stimule la synthèse de certaines protéines appelées protéines de période, lesquelles jouent un rôle de premier plan dans la réinitialisation de l’horloge interne, synchronisant ainsi le rythme circadien avec les cycles environnementaux quotidiens.
Jeter la lumière sur les rythmes circadiens

« Cette étude est la première à révéler le mécanisme par lequel la lumière assure la régulation de la synthèse des protéines dans le cerveau, et son incidence sur la fonction de l’horloge interne », affirme Nahum Sonenberg, auteur en chef de l’article et professeur au Département de biochimie de l’Université McGill.

Afin d’étudier le mécanisme régissant l’horloge du cerveau, les chercheurs ont provoqué la mutation d’une protéine appelée eIF4E dans le cerveau de souris de laboratoire afin qu’elle ne puisse pas être phosphorylée. Les mammifères étant tous dotés d’une horloge interne semblable, les expériences menées chez des souris permettent d’avoir un aperçu de ce qui se produirait si on inhibait la fonction de cette protéine chez les humains.

Une course contre la montre

Les souris ont été placées dans des cages munies d’une roue. L’enregistrement et l’analyse de l’activité des animaux ont permis aux scientifiques d’étudier les rythmes circadiens chez les souris mutantes.

Résultat : l’horloge des souris mutantes a répondu moins efficacement que celle des souris normales à l’effet de réinitialisation provoqué par la lumière. Les souris mutantes se sont révélées incapables de synchroniser leur horloge interne avec une série exigeante de cycles de clarté et d’obscurité – par exemple, 10,5 heures de clarté suivies de 10,5 heures d’obscurité, plutôt que les cycles de 12 heures auxquels les souris de laboratoire sont généralement exposées.

« Bien qu’il soit difficile de savoir à quel moment ces découvertes pourront se traduire par des applications cliniques, notre étude ouvre une nouvelle fenêtre sur la manipulation des fonctions de l’horloge interne », explique Ruifeng Cao, boursier postdoctoral au sein du groupe de recherche du professeur Sonenberg et auteur principal de l’étude.

Selon Shimon Amir, coauteur de l’étude et professeur au Département de psychologie de l’Université Concordia, ces travaux pourraient permettre de cibler le problème à la source. « Le dérèglement du rythme circadien est parfois inévitable, mais il peut avoir de graves conséquences. Cette étude montre l’importance des rythmes circadiens pour notre bien-être général. Nous avons franchi une étape importante vers la réinitialisation de l’horloge interne du corps et, de ce fait, vers l’amélioration de la santé de milliers de personnes. »

Partenaires de recherche : cette étude a été financée par les Instituts de recherche en santé du Canada, les Instituts nationaux de la santé des États-Unis, l’Institut médical Howard Hughes, le Fonds de recherche du Québec ‒ Santé et une bourse postdoctorale Banting.

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L’article « Light-regulated translational control of circadian behavior by eIF4E phosphorylation », par Ruifeng Cao et coll., a été publié en ligne le 27 avril 2015 dans la revue scientifique Nature Neuroscience. http://dx.doi.org/10.1038/nn.4010