La recherche vise à clore un débat de longue date

Le virus du papillome humain, ou VPH, qui infecte la peau et la région génitale, est une cause courante de cancers des organes génitaux, de l’anus et de l’oropharynx chez les hommes et les femmes. Le risque de transmission du VPH lors de relations sexuelles orales et génitales avec pénétration est déjà bien attesté par la recherche. Or, bien que le VPH soit aussi souvent détecté au niveau des mains, la transmission du virus par contact manuel avec la région génitale est depuis longtemps une source de débat entre les chercheurs.

Dans une nouvelle étude publiée dans The Lancet Infectious Diseases, des chercheurs de la Faculté de médecine de l’Université McGill visent à clore ce débat. Leur conclusion : contrairement à l’infection génitale, l’infection au VPH au niveau des mains n’augmente pas le risque de transmettre le virus à un partenaire sexuel.

Les types de VPH détectés sur les mains chez une personne sont généralement les mêmes que ceux qu’on retrouve au niveau génital chez cette personne et son partenaire, explique Talía Malagón, chercheuse postdoctorale sous la supervision du Dr Eduardo Franco, au Département d’oncologie Gerald Bronfman de l’Université McGill, et première auteure de l’article. Certains scientifiques ont donc formulé l’hypothèse que les contacts manuels avec la région génitale pourraient suffire à transmettre le VPH. « Ce n’est pas parce qu’on détecte de l’ADN du VPH sur les mains que les particules virales sont nécessairement viables ou suffisantes pour causer une infection », fait remarquer la chercheuse. « L’ADN pourrait se trouver sur les mains parce que la personne a récemment eu des relations sexuelles ou touché ses propres organes génitaux. »

Bien que d’autres travaux aient déjà porté sur la présence du VPH au niveau des mains chez les partenaires sexuels, l’étude de McGill est la plus vaste et la première à établir explicitement si la transmission du VPH par contact manuel peut se produire indépendamment de la transmission par contact génital direct. Les résultats obtenus fournissent les preuves les plus solides à ce jour de l’improbabilité de la transmission du VPH des mains aux organes génitaux. « Nous avons en effet découvert que dans la majorité des cas, le VPH détecté au niveau des mains d’une personne provenait probablement de sa propre infection génitale », dit le Dr Franco, directeur du Département d’oncologie Gerald Bronfman et auteur principal de l’article.

Tirer parti de la cohorte de l’étude HITCH

Ayant consulté les données d’un autre groupe de recherche indiquant que les partenaires sexuels avaient souvent les mêmes types de VPH au niveau des mains et des organes génitaux, les chercheurs ont réalisé qu’il serait facile d’examiner la question dans le cadre de leur propre étude HITCH, mais avec un échantillon beaucoup plus grand. « Nous avons obtenu les mêmes résultats que l’autre étude, mais avons décidé de pousser un peu plus loin en étudiant les infections aux mains et aux organes génitaux pour déterminer laquelle était survenue en premier, et laquelle des deux infections était responsable de la transmission du VPH entre les partenaires », poursuit Talía Malagón.

L’équipe a recruté des centaines de partenaires hétérosexuels qui ont accepté de fournir quelques fois par année des échantillons prélevés sur les mains et les organes génitaux. Les chercheurs ont génotypé les échantillons à la recherche d’ADN du VPH et analysé les données sur les infections au fil du temps pour déterminer qui contractait quel type d’infection. Les participants étaient plus susceptibles de contracter le VPH au fil du temps lorsque leur partenaire était porteur d’une infection au VPH aux mains ou aux organes génitaux. Cependant, les chercheurs ont découvert que le risque d’infection était largement attribuable à l’infection génitale du partenaire, et qu’une fois ce facteur pris en compte, le risque d’infection n’était plus corrélé avec l’infection aux mains.

Talía Malagón précise que les résultats ne signifient pas qu’il est impossible de transmettre le VPH lors de contacts sexuels entre les mains et les organes génitaux. « Cela signifie simplement que même si ce mode de transmission du VPH est possible, il est rare, puisque nous ne l’avons pas observé; il est donc peu probable qu’il explique la plupart des cas de transmission du VPH ».

La vaccination demeure la meilleure défense

« Le VPH est très courant, et la plupart des adultes sexuellement actifs seront infectés au cours de leur vie, sans s’en rendre compte, avant que leur système immunitaire ne se débarrasse de l’infection », explique le Dr Franco. « Notre étude suggère qu’il est beaucoup plus probable de contracter et de transmettre le VPH par contact génital avec pénétration que lors de contacts manuels avec les organes génitaux. Les condoms peuvent réduire le risque d’infection, mais ils n’offrent qu’une protection partielle. La méthode de prévention la plus efficace contre l’infection et les cancers associés au VPH est donc la vaccination. Chez les femmes, il est aussi possible de dépister l’infection au VPH pour éviter qu’elle n’évolue en un cancer du col de l’utérus. »

 

“Is there a Role for Hand-to-Genital Sexual Transmission of Human Papillomavirus? Results from the HITCH Cohort Study,” par Talía Malagón, et al., publié dans The Lancet Infectious Diseases
http://dx.doi.org/10.1016/S1473-3099(18)30655-8
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Le 12 février 2019