Tamara Carver, Ph. D., directrice du Bureau de technologie éducative et d’apprentissage en ligne en santé (Ed-TECH) de la Faculté de médecine et des sciences de la santé (FMSS) et professeure agrégée à l’Institut d’éducation en sciences de la santé (IÉSS), a récemment reçu le prestigieux prix Maude-Abbott. Ce prix souligne les réalisations remarquables d’une professeure en début de carrière qui excelle en enseignement, en recherche ou en administration. Il met en lumière le rôle important de promotion de l’excellence en enseignement que joue la Pre Carver en créant des stratégies pédagogiques innovantes centrées sur l’apprenant et misant sur l’apprentissage actif.

Maude Abbott, célèbre pathologiste cardiaque et conservatrice du musée médical de l’Université McGill, a ouvert la voie aux femmes en médecine au Canada. Diplômée en médecine de l’Université Bishop’s en 1894, elle a reçu un grade MDCM honorifique de l’Université McGill en 1910. Nous avons parlé avec la Pre Carver des parallèles entre son parcours et celui de la Dre Abbott, de même que de sa vision de l’innovation en matière de stratégies d’apprentissage.

La Dre Maude Abbott a laissé un héritage exceptionnel en tant qu’enseignante, chercheuse et championne de l’enseignement supérieur. Existe-t-il des parallèles entre vous et la Dre Abbott?

Je suis surtout honorée de voir mon nom associé au sien. Je crois en effet que nos parcours se rejoignent à plusieurs égards : je partage entre autres sa passion pour l’éducation médicale, l’enseignement et le mentorat. Mon travail comme innovatrice en éducation médicale, enseignante et mentore me procure beaucoup de bonheur. Je partage également des liens étroits avec les Cantons de l’Est, où elle a obtenu son diplôme de médecine. Une autre similitude entre nous est le rôle majeur qu’ont joué nos grands-mères maternelles dans nos vies. La mienne a eu une profonde influence sur moi. Elle m’a fait comprendre la valeur de l’éducation et m’a appris à être heureuse et fière de mon travail.

Autre parallèle intéressant : nous avons toutes deux été refusées en médecine à l’Université McGill. J’ai fait des démarches auprès de la Faculté, comme elle, avec le même résultat, mais cela ne nous a pas empêchées de poursuivre notre passion. Ce moment a eu un effet transformateur et m’a ouvert les yeux sur ma véritable passion, l’éducation. J’ai senti qu’un jour, ma carrière me mènerait de nouveau à la Faculté de médecine et des sciences de la santé dans un rôle de pédagogue, ou même d’enseignante en pédagogie. Et j’y suis aujourd’hui!

Votre travail avant-gardiste a contribué à l’innovation dans le domaine de l’enseignement médical et de l’apprentissage actif. Vous mentionnez comme l’une de vos sources d’inspiration la théorie de l’apprentissage expérientiel de Kolb. Comment définiriez-vous ce type d’apprentissage, et en quoi est-ce important de personnaliser l’expérience d’apprentissage?

Kolb décrit l’apprentissage comme « un processus par lequel on crée un savoir en transformant son expérience vécue ». Je pense que les styles d’apprentissage varient et qu’il est important de « vivre » son apprentissage. Cela laisse place à l’apprentissage autonome, à l’apprentissage par la pratique et à l’apprentissage par problèmes, qui sont essentiels en formation médicale.

L’expérience de l’apprenant est au cœur de mon approche pédagogique. Cette approche compte plusieurs facettes interconnectées, notamment la façon dont l’expérience d’apprentissage est conçue et présentée aux apprenants. Le bien-être et le contexte personnel des apprenants sont aussi pris en compte. Dans tout ce que je fais, je me mets à la place de la personne apprenante et je me demande : « Comment va-t-elle recevoir ce contenu et comment pourra-t-elle l’intégrer? »

Mon objectif est de créer une expérience d’apprentissage personnalisée en utilisant les technologies éducatives et des modèles d’apprentissage mixtes ou hybrides comprenant des activités asynchrones et synchrones pour permettre aux apprenants de s’engager dans l’expérience d’apprentissage de la manière la plus efficace pour eux. L’équipe du Bureau Ed-TECH vise à créer des expériences éducatives ouvertes et stimulantes en mettant l’accent sur l’équité, la diversité et l’inclusion tout au long du processus de conception pédagogique.

Au terme d’un processus de recrutement international, vous avez été nommée directrice du tout nouveau Bureau Ed-TECH en août 2020, en pleine pandémie de COVID-19. Quelles sont vos plus grandes fiertés jusqu’ici?

Mon rôle dans la création du Bureau Ed-TECH est LA réalisation la plus gratifiante de ma carrière. La première année de mon mandat, et malgré les contraintes liées à la pandémie et à la pénurie de main-d’œuvre, j’ai réussi à constituer une équipe extraordinaire composée de professionnels hautement qualifiés. Notre équipe a été productive dès le départ, même en mode virtuel, et a mené à bien plusieurs grands projets avec nos remarquables collaborateurs. Je suis très fière de diriger une équipe aussi dynamique et performante, composée de personnes compétentes et passionnées qui travaillent en collaboration sur des projets de grand intérêt.

Ensemble, cette dernière année, nous avons mis sur pied un studio d’enregistrement professionnel et un espace de bureau dotés d’une technologie de pointe. Dans cet espace accueillant et plein de vie, nous élaborons des expériences éducatives novatrices pour la communauté, dont le programme d’apprentissage en ligne MODAL, financé par l’Agence de la santé publique du Canada. Ces modules qui visent à soutenir les partenaires de soins des personnes atteintes de démence ont été élaborés en collaboration avec le Programme de formation sur la démence de McGill. Parmi d’autres projets clés réalisés pour la FMSS, citons la série de modules d’apprentissage mixte Votre parcours d’enseignement du Bureau de la formation professorale et le module en ligne de la campagne Le poids des mots, conçu pour sensibiliser aux microagressions qui se produisent dans le milieu d’apprentissage. La qualité de ces projets et le plaisir que prend notre équipe à réaliser ce travail important sont aussi source de fierté.

Votre équipe dit de vous que vous avez remporté la Triple Couronne. Quelle est l’histoire derrière ce titre, et pourquoi y a-t-il un fer à cheval au-dessus de la porte de votre bureau?

Ha! Excellente question. J’ai l’impression d’être vraiment là où je dois être, avec le soutien de la direction du CSAIS, piloté par le Dr Gerry Fried, et de l’IÉSS, sous la gouverne de la Pre Elizabeth Anne Kinsella, et entourée de personnes exceptionnelles qui partagent notre vision commune. Cet environnement stimulant m’a permis de poursuivre mes rêves et d’atteindre de nouveaux sommets dans ma carrière, ce que nous avons appelé, au printemps 2022, « viser la Triple Couronne ». Le défi a commencé avec la Bourse d’excellence et d’innovation en enseignement de la promotion 1970 de médecine, que j’ai reçue en juin 2022. Cette bourse me permettra de prendre un mini congé sabbatique au Royaume-Uni et en Europe au printemps 2023 dans le but de visiter des centres spécialisés où l’on emploie les techniques de réalité étendue et virtuelle en enseignement médical, et d’établir des collaborations solides qui bénéficieront à l’enseignement des professions de santé à la FMSS. Puis, en juillet 2022, j’ai été promue au poste de professeure agrégée à l’IÉSS. Le prestigieux prix Maude-Abbott, reçu cet automne, complète la Triple Couronne. Pour marquer l’occasion et en souvenir de l’incroyable soutien qui m’a permis de franchir ces étapes, le Dr Fried m’a offert un fer à cheval que j’ai accroché à l’envers au-dessus de la porte de mon bureau. Je ressens une immense gratitude pour la carrière que je mène et je souris tous les jours en regardant les gens passer sous ce fer à cheval, sachant que la même chance les touche un peu.

Elizabeth Anne Kinsella, Tamara Carver et Gerald Fried (Photo : Owen Egan/Joni Dufour)
Tamara Carver avec sa mère, Miriam, et son père, Don (Photo : Owen Egan/Joni Dufour)
Tamara Carver et Daniel Petersen Escobedo, créateur de contenu multimédia au Bureau Ed-TECH (Photo : Owen Egan/Joni Dufour)
Tamara Carver dans le studio du Bureau Ed-TECH en compagnie de Brian Thompson, directeur général, Santé et affaires médicales, Avancement universitaire (Photo : Owen Egan/Joni Dufour)