La Dre Joanne Jepson, diplômée de l’École de médecine et grande collectionneuse d’art, a passé la majeure partie de sa vie en Californie tout en conservant un profond attachement à son alma mater. Son legs est le point d’orgue de toute une vie de générosité envers l’Université McGill.
Joanne Jepson (MDCM 1959) n’a jamais fait les choses à moitié. Elle est devenue oncologue à une époque où peu de femmes pouvaient rêver d’une carrière, encore moins en médecine, et avant que les progrès médicaux n’aient fait augmenter le taux de survie à un cancer.
La Dre Jepson cultivait une grande curiosité. Elle se passionnait pour les arts et la science, deux domaines qui s’enrichissent mutuellement. Bien qu’elle ait vécu la plus grande partie de ses 91 années de vie dans la région de la baie de San Francisco, elle a toujours gardé de bons souvenirs de ses années passées à McGill.
Durant ses études en médecine à la fin des années 1950, elle a reçu à trois reprises la bourse établie par la succession d’Helen Richmond Young Reid (B.A. 1889, LL.D. 1921), une réformatrice sociale de Montréal qui a fait partie de la première cohorte de femmes admises à l’Université. Par la suite, la Dre Jepson a été professeure adjointe en médecine de recherche de 1963 à 1970.
Au cours des dix dernières années, elle a prodigué à la communauté mcgilloise les fruits de ses deux passions en donnant les plus belles pièces de sa collection d’art, puis, à son décès en 2022, un legs testamentaire. Ce don servira à établir une nouvelle bourse professorale en médecine, pour renforcer la contribution de McGill à la lutte mondiale contre les maladies infectieuses et créer plusieurs bourses scientifiques à l’intention d’étudiantes et étudiants autochtones.
« La Dre Jepson a eu cette extraordinaire vision de consacrer une généreuse part de sa succession à la recherche de solutions aux problèmes de santé et aux maladies infectieuses dans le monde », a déclaré la Dre Lesley Fellows (B.Sc. 1990, MDCM 1996, résidence en médecine 2001), vice-rectrice(Santé et affaires médicales), et doyenne de la Faculté de médecine et des sciences de la santé. « Cette nouvelle bourse professorale vient combler de grands besoins à l’appui de l’importante recherche dans ce domaine à McGill et profitera directement aux populations les plus vulnérables. »
La bourse professorale Joanne-Hope-Jepson en matière de maladies infectieuses en études médicales mondiales sera remise par la Faculté à une clinicienne ou un clinicien scientifique pour ses activités de recherche ou cliniques dans le contexte de la santé mondiale.
Inspirée par l’art autochtone qu’elle adore et collectionne, la Dre Jepson a aussi investi au profit de personnes qui contribuent à enrichir la sagesse autochtone et à promouvoir la réconciliation. Grâce à sa générosité, la bourse de recherche Joanne-Jepson sera décernée à des étudiantes et étudiants autochtones des cycles supérieurs en médecine et en sciences de la santé, en médecine dentaire, en génie, en agriculture ou en sciences.
« Les initiatives rendues possibles par le legs de la Dre Jepson témoignent de son véritable souci des gens et des enjeux touchant McGill et le Canada, et de sa détermination à améliorer le monde autant que possible, souligne Marc Weinstein, vice‐recteur, Avancement universitaire. Elle voulait que toutes les populations aient un accès équitable aux services de santé. »
Jusqu’à la toute fin de sa vie, elle s’est adonnée à sa passion pour le dessin. Et quiconque a visité l’un des campus de McGill a probablement pu admirer au moins l’une des plus de 300 pièces réparties dans 90 immeubles qu’elle a généreusement données à l’Université. Ces œuvres issues de sa collection ont été achetées dans des galeries ou directement aux artistes lors de ses voyages : sculptures, masques et paniers autochtones, estampes japonaises anciennes et contemporaines, art d’Océanie, etc.
Cette scientifique de formation s’est rigoureusement renseignée sur chacune de ses acquisitions; dans certains cas, elle en savait même plus que les spécialistes.
« Elle n’était pas du genre à rechercher les œuvres hyperconnues que tout le monde convoite », affirme Gwendolyn Owens, directrice de la Collection d’art visuel de McGill, qui a beaucoup côtoyé et admiré la Dre Jepson pendant de longues années. « En médecine, avant de poser un diagnostic, il faut bien examiner tous les paramètres. Elle appliquait la même rigueur pour sa collection. Chaque pièce a son histoire. »
Marc Weinstein et Gwendolyn Owens ont eu la chance de visiter la philanthrope à San Francisco pendant les dernières années de sa vie. Gwendolyn Owens a découvert, sans surprise, une maison remplie de magnifiques œuvres et une femme retraitée depuis longtemps qui continuait néanmoins de s’intéresser au monde, écoutait des balados et créait des liens dans LinkedIn.
« Son esprit la transportait à différents endroits, se rappelle sa cousine, Donna Pace, de San Francisco. Il fallait qu’elle aille en apprendre plus à leur sujet. »
Par ailleurs, elle adorait enseigner, transmettre sa passion pour l’art et la médecine. « Elle s’intéressait vraiment aux étudiantes et étudiants », témoigne Gwendolyn Owens, qui a demandé à des stagiaires d’effectuer des recherches et de présenter des œuvres de la collection à la Dre Jepson lors d’une visite mémorable à McGill, en 2014.
Même pendant les derniers mois de sa vie, elle continuait d’entretenir des relations avec des étudiantes et étudiants en médecine et des résidentes et résidents en milieu hospitalier, raconte David, le mari de Donna Pace.
« Elle était ravie de voir des étudiantes et étudiants entrer dans sa chambre, dit-il. Elle leur posait des questions, les regardait s’occuper d’elle. Ça la rendait heureuse et elle avait beaucoup de patience à leur égard. »
Durant sa retraite, la Dre Jepson s’est particulièrement rapprochée de la famille Pace. Donna et David gardaient une chambre pour elle et Willow, son bichon frisé. À la table du déjeuner, toute la famille entretenait de longues conversations avec elle.
« Elle avait de belles histoires à raconter, et nous l’aimions énormément, se remémore sa cousine. Elle comblait le vide qu’avaient laissé nos parents dans nos vies. Elle n’a jamais eu d’enfants, mais nous la considérions comme notre mère.
« Avec sa vie bien remplie, elle avait toutes les raisons du monde de se glorifier de tout ce qu’elle avait fait, mais ce n’était pas du tout son genre. »
Quand la santé de la Dre Jepson s’est mise à décliner au point où elle ne pouvait plus correspondre par courriel, Gwendolyn Owens lui a parlé par téléphone à quelques occasions. Leur dernière conversation s’est déroulée pendant la pandémie et portait justement sur ce sujet. La Dre Jepson était loin de se désintéresser du monde et de ses problèmes dans toute leur complexité.
« Elle me manque beaucoup, confie Gwendolyn Owens. Elle avait toujours soif d’apprendre. Je pense qu’elle avait gardé des souvenirs heureux de McGill. Avec le temps, j’ai remarqué qu’en vieillissant, les collectionneuses et collectionneurs ont tendance à se remémorer les plus beaux moments de leur vie, et dans le cas de la Dre Jepson, je pense que McGill en faisait partie. »
Cet article est d’abord paru sur le site philanthropie.mcgill.ca.