Source : Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada

Pour certaines victimes de la traite de personnes au Canada, la consultation d’un professionnel de la santé peut être l’unique occasion d’obtenir de l’aide, que ce soit auprès d’une personne qui protège et accompagne la patiente en répondant à toutes les questions, d’une infirmière qui a remarqué une brûlure de cigarette, ou d’un médecin qui reconnaît les tatouages que portent souvent les victimes.

C’est ce qui explique pourquoi des agents de l’unité d’enquête Traite de personnes à des fins d’exploitation sexuelle du Service de police de la Ville de Montréal et des éducateurs médicaux de l’Université McGill animeront un panel en plénière lors du Sommet de simulation, qui se tiendra à Winnipeg, les 7 et 8 novembre 2019. Ils espèrent que les connaissances et l’expertise apportées aux éducateurs en simulation du Canada et d’ailleurs doteront un plus grand nombre de professionnels de la santé de première ligne des compétences et de l’information requises pour améliorer la vie des victimes.

Le Sommet de simulation est une conférence interprofessionnelle unique sur la formation médicale par simulation. En misant sur le réseautage et les occasions d’apprentissage formelles et informelles, le Sommet de simulation du Collège royal a pour but de rassembler les éducateurs en simulation novices et chevronnés afin qu’ils échangent des idées, explorent la recherche et fassent progresser les pratiques exemplaires en formation par simulation chez les professionnels de la santé. On envisage également le recours à la simulation pour aider les victimes de la traite de personnes.

De gauche à droite : Mme Françoise Filion, professeure, Mme Josée Mensales, policière, Mme Niki Soilis et M. Loïc Simard-Villeneuve.

« Environ 80 % des victimes de la traite de personnes consultent un professionnel de la santé au cours de leur vie et passent presque inaperçues, affirme Françoise Filion, professeure adjointe à l’École des sciences infirmières Ingram de l’Université McGill. « Le personnel n’a pas les compétences requises pour reconnaître les victimes et leur fournir des soins. »

Il y a quelques années, Mme Filion voulait que ses étudiants puissent détecter les signes avant-coureurs de traite de personnes ou d’exploitation sexuelle. Elle a donc commencé à inviter en classe des policiers et des personnes ayant survécu à ce genre de crime. Les commentaires des étudiants ont été tellement positifs qu’ils l’ont incitée à collaborer avec Loïc Simard-Villeneuve, formateur des patients standardisés du Centre de simulation et d’apprentissage interactif Steinberg (CSAIS), afin de créer un scénario sur la traite de personnes. « Ces simulations permettent aux étudiants d’acquérir des compétences en communication et de les mettre en pratique dans un environnement sécuritaire pour qu’ils puissent reconnaître les victimes dans le contexte clinique et les aider », explique M. Simard-Villeneuve.

Deux policières, Josée Mensales et Diane Veillette, feront partie des panélistes. Elles ont cofondé le programme Les survivantes, qui aide les victimes et leurs familles à faire face aux situations liées à l’exploitation sexuelle.

« Nous avons monté des formations qui expliquent qui sont les trafiquants, qui sont les victimes et comment nous intervenons, précise Mme Mensales. Nous avons aussi tenté de mieux protéger les survivantes. Nous voulions qu’elles puissent s’exprimer et faire ressortir davantage le côté humain de nos fonctions. »

Les deux policières se disent privilégiées de pouvoir profiter du Sommet pour expliquer leur travail et le rôle crucial que jouent les professionnels de la santé pour aider les victimes.

« Les consultations médicales sont souvent l’unique occasion où les victimes ne sont pas en présence de ceux qui profitent d’elles et où elles peuvent se confier, précise Mme Mensales. Les professionnels de la santé doivent donc être outillés pour s’en rendre compte rapidement. »

La traite de personnes, le crime qui connaît la plus forte croissance au Canada, fait circuler d’importantes sommes d’argent. Les trafiquants se déplacent souvent d’une province à l’autre pour ne pas être détectés.

Mme Niki Soilis, gestionnaire de l’éducation au CSAIS, est d’avis que la participation de la police et des éducateurs de la santé au Sommet de simulation est importante.

« Les gens doivent comprendre l’optique policière, précise-t-elle. Le programme Les survivantes que coordonnent les agentes Mensales et Veillette est centré sur les participantes. Il vise à aider les victimes. Les services qui leur sont offerts ont évolué avec le temps, si bien que chaque participante peut aujourd’hui en profiter dans le cadre de son cheminement. » On collabore étroitement avec les communautés autochtones et LGBTQ+. Au Canada, la moitié des victimes de la traite de personnes sont des femmes autochtones.

« L’approche en matière de soins de santé au Canada a toujours été bio-comportementale », ajoute Mme Soilis, au détriment des déterminants sociaux de la santé.

« J’espère que le recours à la simulation sera envisagé pour évaluer nos responsabilités sociales et ce qui se produit vraiment dans nos communautés mais qui passe sous silence. »

« Une personne peut présenter une infection urinaire, mais ce qu’elle a vécu peut aussi inspirer d’autres personnes. »

Cette année, le thème de la conférence sera « Suivre le courant de la diversité en simulation ».

Le 25 octobre 2019