La semaine dernière, Grands Défis Canada a annoncé un investissement de 2 M$ dans 20 innovations canadiennes pour s’attaquer aux problèmes persistants de la santé des femmes et des enfants dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
Conçues dans des établissements canadiens d’un océan à l’autre, ces idées audacieuses englobent une gamme de solutions créatives pour sauver et améliorer la vie de femmes et d’enfants parmi les plus pauvres et les plus vulnérables du monde en Afrique, en Asie et dans les Caraïbes.
Les projets recevront chacun une subvention de démarrage d’environ 100 000 $ pour développer et mettre à l’essai leur innovation, financée par Grands Défis Canada avec le soutien financier du gouvernement du Canada par l’entremise d’Affaires mondiales Canada.
Les trois projets de l’Université McGill sont les suivants :
Améliorer le diagnostic de la tuberculose infantile dans les milieux à forte prévalence
Chaque année, dans le monde, environ un million d’enfants contractent la tuberculose, et jusqu’à 210 000 en décèdent – des chiffres effarants auxquels une équipe de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill a décidé de s’attaquer.
Le Dr Madhukar Pai, directeur associé du Centre international de TB de McGill, rattaché à l’IR-CUSM et à l’Université McGill, et son équipe ont reçu une subvention de Grands Défis Canada pour leurs travaux d’avant-garde visant à améliorer le diagnostic de la tuberculose chez les enfants de moins de 15 ans.
« Il est difficile de détecter la TB chez les enfants et nous devons mettre au point de meilleurs outils pour protéger cette population vulnérable », affirme le Dr Pai, également professeur au Département d’épidémiologie, biostatistique et santé au travail de McGill et scientifique au programme des maladies infectieuses et immunitaires en santé mondiale de l’IR-CUSM. « Nous sommes reconnaissants au gouvernement canadien de soutenir nos travaux sur la TB dans le monde. C’est la maladie infectieuse la plus mortelle à l’heure actuelle et nous avons besoin de méthodes et d’outils novateurs pour endiguer l’épidémie. »
Le Dr Pai a reçu par le passé une autre subvention de Grands Défis Canada pour un projet d’évaluation de la qualité des soins de la tuberculose fondé sur des patients mystères. Son équipe et lui ont reçu le présent financement pour la mise au point de biomarqueurs diagnostiques de la tuberculose chez les enfants.
« L’un des avantages majeurs de la nouvelle technique est qu’elle pourrait conduire à un outil diagnostique utilisant les échantillons sanguins, qui sont beaucoup plus facilement accessibles que les expectorations », explique le Dr Toyin Togun, responsable du projet et boursier Steinberg en santé mondiale au Département d’épidémiologie, biostatistique et santé au travail depuis 2016. « En fonction des autres caractéristiques des biomarqueurs, il pourrait aussi être possible de réduire le recours aux services très techniques en laboratoire, ce qui faciliterait le diagnostic précis de la tuberculose. »
La plupart des enfants ne parviennent pas à produire suffisamment d’expectorations à partir du fond de la gorge pour constituer un échantillon adéquat. Même s’ils y parviennent, les outils diagnostiques basés sur ce type d’échantillon donnent souvent des résultats faussement négatifs. Les radiographies pulmonaires peuvent aussi s’avérer peu fiables. Le diagnostic de la tuberculose chez les enfants n’est donc bien souvent qu’une présomption fondée sur une combinaison incertaine de signes et de symptômes.
« Tous ces problèmes compliquent le diagnostic de la TB chez les enfants », ajoute le Dr Togun. « Voilà pourquoi nous avons ciblé cet objet de recherche. Selon nos données préliminaires, notre combinaison de marqueur se montre très efficace pour détecter la maladie chez les enfants. »
Le Dr Togun partage son temps entre Montréal et le centre de développement du projet à l’Unité du Conseil de recherches médicales de la Gambie, en Afrique occidentale. Environ 75 % de tous les cas de tuberculose infantile surviennent dans les 30 pays à forte prévalence de la maladie, dont la majorité se trouve en Afrique subsaharienne.
« Le Centre international de TB de McGill est renommé pour ses recherches interdisciplinaires sur la tuberculose. Le corps professoral mcgillois est reconnu pour ses recherches en science de la mise en œuvre dans des pays à forte prévalence, ainsi que ses efforts d’élaboration de politiques pour l’OMS et d’autres organisations mondiales », souligne le Dr Togun. « McGill excelle en matière de formation, de mentorat, de soutien et d’expertise technique. »
Améliorer les soins cliniques et la survie des nouveau-nés au Cambodge à l’aide d’applications sur tablette et d’un régime de rémunération au rendement
Le Cambodge a un taux de mortalité néonatale élevé, notamment parmi la population pauvre des régions rurales. Une étude récente indique que les travailleurs de la santé ont une faible rétention des connaissances cliniques sur les soins aux nouveau-nés huit mois après leur formation.
Ce projet, piloté par la Dre Anne Andermann, professeure agrégée au Département de médecine de famille de McGill, s’attaquera aux lacunes dans les connaissances et les compétences des travailleurs de la santé et améliorera leur performance clinique dans les soins aux nouveau-nés pour aider à sauver des vies et améliorer la santé. « La subvention servira à financer les recherches postdoctorales que réalisera Keovathanak Khim au Département de médecine de famille de l’Université McGill avant de retourner au Cambodge pour appliquer le protocole de recherche », explique la Dre Andermann, qui est également membre associée du Département d’épidémiologie, biostatistique et santé au travail de McGill.
Le projet s’inscrit dans un grand programme de recherche en santé mondiale, la collaboration CLEAR, dont l’objectif est de renforcer les soins de première ligne et d’aider les professionnels des soins de première ligne à s’attaquer aux causes sociales sous-jacentes des problèmes de santé. Le projet vise à mettre au point des outils simples et conviviaux, notamment des capsules vidéo sur la réanimation néonatale, les soins immédiats au nouveau-né et l’orientation vers des soins appropriés, complétés par des questionnaires et listes de contrôle.
« L’objectif est de fournir aux professionnels de première ligne de meilleurs outils fondés sur des données probantes pour réduire le taux de mortalité infantile », indique la Dre Andermann. Les professionnels de la santé toucheront une prime mensuelle s’ils respectent la fréquence requise d’utilisation de ces outils. Ils seront appuyés par une supervision et un encadrement réguliers.
Le projet sera mis à l’essai dans huit établissements de soins de santé primaires du Cambodge, en partenariat avec l’Université McGill, l’Université des sciences de la santé du Cambodge et le ministère de la Santé du Cambodge.
Découvrez les travaux de la Dre Andermann sur les déterminants sociaux de la santé et le rôle des professionnels de la santé ici.
Renforcer le lien entre les infirmières en soins primaires et les agents de santé communautaire par des visites à domicile axées sur la technologie pour les femmes enceintes
La professeure agrégée Antonia Arnaert et la professeure adjointe Norma Ponzoni, de l’École des sciences infirmières Ingram de l’Université McGill, travaillent depuis plusieurs années à la création d’un vaste programme commun de recherche en santé numérique. Leur projet de cybersanté est axé sur les soins prénataux au Burkina Faso, l’un des pays les plus pauvres du monde. « Malgré la gratuité des soins prénataux au Burkina Faso, l’accès à ces soins demeure problématique pour les femmes des régions rurales », explique la Pre Arnaert. « Elles doivent souvent marcher pendant une journée entière dans des conditions difficiles pour y accéder. Par conséquent, près de 70 % des femmes enceintes ne reçoivent qu’une seule des quatre visites recommandées, ce qui pose un risque pour elles et pour leur bébé. »
Le projet des Pres Arnaert et Ponzoni vise à fournir aux femmes enceintes en milieu rural l’accès à une infirmière sans avoir à se déplacer, en utilisant une application de cybersanté sur iPad pour faciliter la communication entre les infirmières et les agents de santé communautaire. Ces derniers travaillent souvent de façon isolée, sans accès direct aux compétences des infirmières. L’application permet aux infirmières d’accéder en temps réel aux renseignements sur la santé fournis par les agents. Elle permet également la vidéoconférence entre les infirmières de la clinique, les agents de santé communautaire et les femmes enceintes dans les villages éloignés. « Notre passion commune pour la technologie est la base de notre collaboration et de nos recherches », ajoute la Pre Ponzoni. La prochaine étape pour les deux chercheuses sera de passer de l’étude de faisabilité à l’évaluation des coûts et des processus, ainsi qu’à l’élaboration de lignes directrices, dans le but d’aider les organisations de santé à mettre en œuvre les services aux patients à composante technologique.
Le 1 décembre 2017