Des mesures législatives universelles sur le contrôle des armes à feu ne suffiraient pas à éliminer les disparités raciales en matière de violence par arme à feu
Salle de Presse McGill
Selon une étude réalisée à l’Université McGill, les États du sud et de l’ouest des États-Unis ont les plus hauts taux de suicide par arme à feu chez les Blancs, tandis que les États du centre-ouest affichent les plus hauts taux d’homicide par arme à feu chez les Noirs. Ces observations placent sous le feu des projecteurs les États où les politiques sur les armes à feu pourraient contribuer à réduire les taux d’homicide et de suicide.
La violence liée aux armes à feu ne date pas d’hier aux États-Unis. Or, on ne comprend pas encore très bien pourquoi les taux d’homicide et de suicide chez les hommes noirs et les hommes blancs varient d’un État à l’autre et comment la possession d’arme à feu par les ménages influe sur ces statistiques.
Pour élucider la question, des chercheurs de l’Université McGill, au Canada, ont analysé des données figurant sur des certificats de décès afin de déterminer le nombre d’homicides et de suicides par arme à feu survenus dans chaque État des États-Unis entre 2008 et 2016. Ils ont ensuite comparé le nombre d’homicides et de suicides chez les hommes noirs et les hommes blancs. Corinne Riddell, boursière postdoctorale au Département d’épidémiologie, de biostatistique et de santé au travail, et ses collègues, se sont également demandé si les États américains où les taux de possession d’arme à feu se révélaient les plus élevés étaient davantage touchés par la violence par armes à feu. Pour le savoir, ils ont analysé les données qu’ils avaient recueillies afin d’étudier le lien entre les taux d’homicide et de suicide et le taux de possession d’arme à feu par les ménages de chaque État pour les deux groupes.
Les résultats de leur étude, qui ont été publiés dans la revue Annals of Internal Medicine, témoignent de l’existence d’un lien complexe entre les taux de suicide et d’homicide, la race et les taux de possession d’arme à feu d’un État à l’autre.
Les taux d’homicide et de suicide par arme à feu chez les hommes blancs étaient parmi les plus hauts dans les États du sud des États-Unis où les taux de possession d’arme à feu étaient élevés, comme le Mississippi, l’Alabama et l’Arkansas. En revanche, les États où les taux de possession d’arme à feu étaient moins élevés (Massachusetts, New Jersey, Rhode Island, Connecticut et New York) affichaient les plus faibles taux d’homicide et de suicide.
« Il est intéressant d’examiner ces données en fonction de chaque État, affirme Jay Kaufman, professeur au Département d’épidémiologie, de biostatistique et de santé au travail de la Faculté de médecine de l’Université McGill et auteur en chef de l’étude. Chez les hommes blancs, des taux plus élevés de possession d’arme à feu semblent être fortement corrélés à des taux plus élevés de suicide et d’homicide. »
En revanche, les chercheurs n’ont observé qu’une faible corrélation entre les taux de possession d’arme à feu et les taux d’homicide et de suicide par arme à feu chez les hommes noirs. Si les États du nord-est, où les taux de possession d’arme à feu étaient peu élevés, affichaient également les plus faibles taux de suicide par arme à feu chez les hommes noirs, Corinne Riddell souligne que les États où les taux de possession d’arme à feu allaient de moyens à élevés affichaient des taux d’homicide faibles tout autant que des taux élevés.
« Ainsi, au Michigan, où le taux de possession d’arme à feu est relativement élevé, le taux d’homicide par arme à feu chez les hommes noirs se chiffrait à 49 pour 100 000 hommes tandis qu’au Texas, où le taux de possession d’arme à feu est, là aussi, relativement élevé, le taux d’homicide par arme à feu chez les hommes noirs se chiffrait à 18 pour 100 000 hommes », souligne Corinne Riddell.
Ces résultats semblent indiquer que divers facteurs pourraient influer sur les taux d’homicide par arme à feu chez les hommes blancs et chez les hommes noirs d’un État à l’autre.
« Des mesures législatives universelles sur le contrôle des armes à feu applicables au pays tout entier ne suffiraient sans doute pas à éliminer les disparités raciales en matière de violence par arme à feu », affirme Corinne Riddell.
Des études antérieures ont démontré qu’aux États-Unis, les hommes de race noire sont dix fois plus susceptibles d’être victimes d’un homicide et que dans 80 % des cas, il s’agit d’homicides par arme à feu. Les hommes de race blanche sont trois fois plus susceptibles de se suicider et, dans les deux tiers des cas environ, il s’agit de suicide par arme à feu.
L’article « Comparison of rates of firearm and non-firearm homicide and suicide in black and white non-Hispanic men by US state », par Corinne Riddell et coll., a été publié dans la revue Annals of Internal Medicine.
Ces travaux n’ont pas été financés officiellement par une subvention de recherche, mais l’une des coauteurs a reçu le soutien des Instituts nationaux de la santé des États-Unis.
Le 25 avril 2018