Dans notre série McGill au Québec : mission santé, nous mettons en lumière le travail que réalisent des membres de la Faculté de médecine et des sciences de la santé d’un bout à l’autre du Québec. De la Montérégie et de l’Outaouais à l’Eeyou Istchee et au Nunavik, nos apprenants, apprenantes, cliniciens, cliniciennes et scientifiques ont le privilège et la fierté de s’associer aux communautés pour apprendre et enseigner, prendre soin de la population québécoise et améliorer la santé de tous. Découvrez leurs histoires passionnantes!  

Grâce à un programme de McGill, des Québécois et Québécoises vivant en région éloignée reçoivent des soins spécialisés de première importance. Alexander Tsoukas, rhumatologue à McGill, et Michèle Stanciu, résidente, nous en parlent.

Pour les Québécoises et Québécois atteints de maladies chroniques et vivant en région éloignée, l’accès à des soins spécialisés peut se révéler complexe. Cependant, grâce aux programmes de proximité, des spécialistes se rendent directement dans les collectivités mal desservies.  

Depuis dix ans, Alexander Tsoukas, M.D., professeur adjoint à la Division de rhumatologie du Département de médecine et rhumatologue au Centre universitaire de santé McGill (CUSM), s’emploie à améliorer l’accès aux soins de santé. Faisant cause commune avec lui, Michèle Stanciu, M.D., résidente en rhumatologie à McGill, l’a récemment accompagné en Abitibi-Témiscamingue. 

Un programme mcgillois axé sur les soins de proximité 

Tous les deux mois, le Dr Tsoukas passe plusieurs jours à La Sarre et à Amos, en Abitibi. La population de patients de La Sarre comprend de nombreux Québécois francophones, tandis qu’Amos accueille un plus grand nombre de patients et patientes autochtones des communautés environnantes. « Les besoins sont énormes, explique le Dr Tsoukas. Il y a de 60 000 à 70 000 patients dans cette région, et je suis le seul rhumatologue qui s’y rend régulièrement depuis dix ans. » 

L’Abitibi-Témiscamingue relève du RUISSS McGill, qui couvre la moitié du territoire québécois, de Montréal au Nunavik, et dessert environ 1,9 million de personnes dans diverses collectivités. Le RUISSS (Réseau universitaire intégré de santé et services sociaux) a été créé en 2003 par le ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec, qui a attribué une portion du territoire québécois à chacune des quatre facultés de médecine de la province dans le but de faciliter la prestation de soins spécialisés, la formation en médecine et la recherche médicale dans les nombreuses régions du Québec. 

Pour surmonter les obstacles aux soins 

Pour de nombreuses personnes, l’accès aux soins est extrêmement difficile en raison de problèmes de mobilité ou de facteurs comme la distance, les coûts et la pénurie de spécialistes. « En principe, les gens peuvent venir à Montréal pour se faire soigner à McGill, mais peu d’entre eux peuvent se le permettre, explique le Dr Tsoukas. En tant que rhumatologues, nous traitons des maladies chroniques qui, souvent, affectent les articulations et la colonne vertébrale, ainsi que des maladies auto-immunes; nos patients ont donc une mobilité limitée et ne peuvent pas faire le déplacement. Les médecins de famille ont souvent du mal à prendre ces maladies en charge, parce qu’ils n’ont pas l’expertise nécessaire pour le faire en toute autonomie. » 

Alexander Tsoukas

Or, une prise en charge tardive peut accentuer l’agressivité de la maladie ou provoquer des complications évitables, problèmes que l’on voit rarement, souligne le Dr Tsoukas, chez la patientèle montréalaise, qui peut accéder aux soins plus rapidement. Dans certains cas, les soins de proximité peuvent changer complètement la donne. « Souvent, nous avons affaire à des travailleurs manuels aux prises avec des handicaps fonctionnels, explique-t-il. Nous pouvons intervenir assez rapidement et leur fournir des injections ou des traitements plus avancés, auxquels les autres médecins n’ont pas accès. Ces interventions peuvent véritablement changer la vie d’une personne. Dans bien des cas, les patients peuvent passer, en quelques mois, d’un état d’invalidité à un état fonctionnel presque complet. » 

Michèle Stanciu

Les Drs Tsoukas et Stanciu se souviennent d’un cas mémorable : celui d’une patiente qui présentait de douloureuses lésions aux jambes causées par une maladie auto-immune. Après de nombreux traitements infructueux, elle envisageait de venir à Montréal, malgré les difficultés que posaient les 10 heures de route. « Cette patiente avait du mal à marcher à cause de ses douleurs aux jambes, raconte le Dr Tsoukas. Je l’ai vue lors d’un suivi. Toutes ses lésions avaient disparu rapidement grâce au traitement, et elle s’en réjouissait. La relation de confiance que nous avons avec ces gens est vraiment particulière, ce qui rend l’expérience plus gratifiante et plus agréable. » 

Même entre deux séjours, le Dr Tsoukas reste en contact étroit avec les professionnels de la santé de la région. « Même si je n’y vais que tous les deux mois, la communication avec l’équipe infirmière et les médecins est constante, quasi quotidienne, précise-t-il. Presque tous les jours, je reçois un courriel ou une télécopie, et je vérifie des résultats d’analyses sanguines et d’examens d’imagerie. » La télémédecine est aujourd’hui au cœur de son travail : elle lui permet d’orchestrer les soins et de faire des consultations par téléphone, sans que les patients aient à attendre deux mois pour le voir en personne. 

Des moyens d’action pour les médecins désireux de donner au suivant 

Le soutien que l’Université McGill apporte à des médecins en formation comme la Dre Stanciu témoigne de l’importance qu’elle accorde aux soins de proximité. « Je me réjouis que l’équipe du programme de formation en rhumatologie de McGill appuie solidement des initiatives comme celle-ci, lance-t-elle. Dès que j’ai manifesté mon intérêt pour les soins de proximité, le département a été là pour m’épauler. Ils ont aménagé mon emploi du temps pour que je puisse accompagner le Dr Tsoukas. L’expérience a été très enrichissante. J’ai vraiment hâte d’y retourner et d’intégrer les soins de proximité à ma future pratique. » 

Pour son dévouement envers les collectivités mal desservies, le Dr Tsoukas a récemment reçu le Prix d’action de proximité du Département de médecine 2024. « J’ai l’impression de faire ça davantage pour moi, à titre personnel, dit-il. C’est une belle reconnaissance du surcroît de travail que ces déplacements exigent. Et ce qu’il y a de bien, je pense, c’est que ce prix met un peu en lumière les soins de proximité, permet de souligner le travail des médecins qui consacrent une partie de leur temps libre à ce genre d’activités. » 

Soins en personne, télémédecine, échanges réguliers avec les équipes de soins régionales : le programme de soins de proximité de McGill est un modèle fort efficace pour améliorer l’accès aux soins spécialisés. Grâce aux avancées technologiques et à l’offre de plus en plus grande de soins de proximité, ce type de programme nous amène vers un système de santé plus équitable, où les échanges sont plus fluides et où tous et toutes, même dans les régions les plus éloignées, ont accès aux soins dont ils et elles ont besoin. 

Ces belles photos d’Abitibi ont été fournies par les Drs Tsoukas et Stanciu. Cliquez sur les photos ci-dessous pour lancer le diaporama.