Sherif Emil, MDCM, est très enthousiaste quant à l’avenir de la RAAC en chirurgie pédiatrique. RAAC, abréviation de « récupération améliorée après chirurgie », est un parcours de soins périopératoires multimodaux conçus pour permettre une récupération rapide des patients qui subissent une intervention chirurgicale majeure. Le mois dernier, l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME) a accueilli la première conférence canadienne consacrée à la RAAC en pédiatrie afin de promouvoir la culture RAAC dans les soins chirurgicaux pédiatriques et de partager les applications pédiatriques de la RAAC avec un large public.  

Avec six principes de base fondés sur des données probantes, tels que l’engagement du patient et de sa famille et la gestion de la douleur avec moins de narcotiques, la RAAC permet d’obtenir de meilleurs résultats pour les patients qui subissent une intervention chirurgicale, notamment l’amélioration de l’expérience patient, la réduction de la durée du séjour à l’hôpital, la diminution des taux de complication et la réduction des réadmissions à l’hôpital.  

Selon le Dr Emil, le Centre universitaire de santé McGill (CUSM) est depuis longtemps à l’avant-garde de la RAAC. « Au cours de la dernière décennie, la docteure Liane Feldman, le docteur Franco Carli et d’autres spécialistes ont vraiment été parmi les leaders mondiaux de la mise en œuvre de l’ERAS. » 

Le rétablissement d’un enfant est le rétablissement d’une famille  

L’introduction de la RAAC en chirurgie pédiatrique est toutefois un concept beaucoup plus récent. Le Dr Emil, titulaire de la chaire Fondation Mirella et Lino Saputo en enseignement de la chirurgie pédiatrique et des soins centrés sur les patients et les familles, explique que certaines questions concernant les adultes subissant une intervention chirurgicale ne se posent pas lorsqu’il s’agit d’enfants.  

« Les adultes ont besoin de savoir quand ils pourront retourner au travail ou reprendre leurs autres responsabilités, mais des questions similaires n’ont pas été traditionnellement posées pour les enfants. »  

Le Dr Emil s’intéresse à la RAAC et s’y investit depuis longtemps, et c’est son rôle de titulaire de la chaire de la Fondation Saputo qui l’a incité à la développer davantage. « L’un des mandats de la chaire est d’offrir des soins axés sur le patient et la famille, et il est évident que la RAAC s’harmonise parfaitement avec le fait de ramener les enfants dans leur famille plus rapidement, et les membres de la famille au travail plus rapidement. Le rétablissement d’un enfant est le rétablissement d’une famille. » Il souligne l’engagement de la Fondation de l’HME, dont la campagne de financement a permis de soutenir la RAAC dans le cadre d’un projet sur la qualité chirurgicale. 

 

En décembre 2018, la première réunion internationale sur la RAAC pédiatrique a eu lieu en Virginie. « C’était la première fois que les chirurgiens pédiatriques et les anesthésiologistes commençaient même à parler ensemble de la RAAC », explique le Dr Emil.  

Peu après, le Dr Kurt Heiss, chirurgien pédiatre à l’Emory University (Atlanta) et défenseur de la première heure de la RAAC, s’est exprimé lors des réunions scientifiques de chirurgie pédiatrique et de pédiatrie de l’HME, en tant que professeur invité Frank M. Guttman 2019. « À ce moment-là, nous avions commencé à élaborer des protocoles RAAC et planifiions une importante retraite à ce sujet pour mai 2020, mais bien sûr, elle a dû être annulée à cause de la pandémie. » 

La COVID-19 a mis un frein à la mise en place de nouveaux protocoles RAAC, mais l’équipe chirurgicale a continué à planifier l’avenir. « Ces dernières années, nous avons mis au point deux protocoles RAAC : l’un pour la scoliose et l’autre pour la chirurgie des anomalies de la paroi thoracique, qui ont connu un grand succès », explique le Dr Emil. « Les patients opérés à la paroi thoracique, qui restaient auparavant hospitalisés six à sept nuits, quittent désormais l’hôpital le lendemain matin. » 

Un certain nombre de nouveaux membres de l’équipe ont été embauchés, notamment trois infirmières praticiennes spécialisées qui, en plus de fournir des soins, mettent en place de nouveaux programmes, dont la RAAC est l’un des plus importants.  

Le Dr Emil ajoute : « Des représentants du ministère de la Santé et des Services sociaux (MSSS) nous ont également contactés pour en savoir plus sur le développement de la RAAC et, après plusieurs réunions, ont autorisé qu’une infirmière coordonnatrice dirige le projet à temps plein. Nous avons également une étudiante au deuxième cycle – une résidente en chirurgie – qui a décidé de faire de la RAAC son sujet de maîtrise. Tout est en place pour nous permettre d’accélérer grandement l’implantation de la RAAC en pédiatrie. »  

Faire connaître la RAAC pédiatrique à un public plus large  

Maintenant que de nombreuses activités mises en veilleuse par la pandémie peuvent reprendre, la Division de chirurgie pédiatrique a pu accueillir la conférence multidisciplinaire « RAAC : Une nouvelle ère dans les soins chirurgicaux pédiatriques » le vendredi 28 avril.  

Ce congrès d’une journée a réuni des conférenciers de l’HME et du CUSM, ainsi que des représentants du MSSS, des patients et des experts d’ailleurs au Canada et aux États-Unis. Toutes les parties prenantes étaient représentées au sein de la centaine de participants des plus enthousiastes, venus de partout au Québec. 

En organisant cette conférence, la division souhaitait faire connaître les principes de la RAAC pédiatrique à un large public. « Nous voulons lancer un mouvement qui profitera aux milliers d’enfants du Québec qui recevront des soins chirurgicaux à l’avenir, ainsi qu’à l’ensemble de notre système de santé », déclare le Dr Emil. « Je dis souvent que la RAAC est la grande perturbatrice de notre époque, et c’est à notre tour de brasser la cage! »