Par Christina Kozakiewicz, École des sciences infirmières Ingram

Notre corps professoral est l’âme de l’École des sciences infirmières Ingram (ÉSII). À l’occasion de la Journée internationale du mentorat 2019, Susan Drouin raconte sa passion, entre autres, pour le mentorat et le perfectionnement en leadership. Avant d’assumer à temps plein les fonctions de professeure agrégée et de directrice, Initiatives de formation en ligne et Formation continue en soins infirmiers à l’ÉSII en 2016, Susan Drouin a été infirmière soignante, infirmière gestionnaire, et directrice associée des soins infirmiers en santé des femmes, en pédiatrie, en santé mentale, en services chirurgicaux, et en perfectionnement clinique et professionnel du personnel. Susan fait carrière en sciences infirmières depuis 35 ans. En janvier 2019, Susan a accepté un nouveau mandat au poste de Directrice adjointe, École des sciences infirmières Ingram – Programmes d’études supérieures et en ligne.

La Journée internationale du mentorat est soulignée chaque année le 17 janvier, date qui évoque aussi l’héritage de Muhammad Ali, afin de célébrer l’importance et la portée du mentorat, et sa contribution à la création d’un monde meilleur.

Pourquoi avez-vous choisi de devenir infirmière?

Mon intérêt pour les gens et les sciences s’est éveillé à l’occasion de bénévolat auprès d’enfants handicapés, et des interactions avec les professionnels qui s’occupaient d’eux.

Qu’est-ce qui a suscité votre intérêt notamment pour le perfectionnement en leadership et le mentorat? Et pour quelles raisons?

Pendant mon enfance et par la suite, j’ai eu des enseignants extraordinaires et j’ai été accueillie au sein de la profession infirmière par de merveilleuses pédagogues durant un emploi d’été à l’Hôpital de Montréal pour enfants (HME) en 1981. Très généreuses de leur temps, elles ont créé un milieu accueillant d’apprentissage et ont constamment fait preuve de confiance en mon potentiel – malgré ma modeste contribution à cette époque aux soins des patients et de leur famille comme étudiante en sciences infirmières. Au fil de ma carrière, nombre d’autres m’ont ouvert des portes, ont cru en mes aptitudes, m’ont encadrée, ont été des mentors pour moi et m’ont assuré tout le soutien qui m’était indispensable. Je suis reconnaissante de cette marque continue de confiance aux infirmières, aux pédagogues, aux médecins, aux administrateurs et à mes amis et à ma famille.

Cette initiation fondamentale par d’autres infirmières, dès mes tout premiers pas comme infirmière autorisée, m’a permis d’observer et de connaître les bienfaits directs d’une telle approche de soutien. Au point de vouloir que d’autres générations d’infirmières tirent parti de mon expérience. Dès lors, j’ai suivi une éducation en bonne et due forme, afin de mieux comprendre les obstacles et les leviers d’action dans la prestation des services de santé et les secteurs de l’éducation, et de façonner un lieu de travail ou un milieu d’enseignement propice à l’apprentissage et à l’engagement permanents, grâce au mentorat et à l’accompagnement. Cela dit, j’ai été maladroite et fait moult erreurs, mais l’enrichissement de ces expériences initiales a maintenu intacte ma volonté de m’améliorer. Une carrière en soins infirmiers s’étend sur de nombreuses années; d’où la nécessité de cultiver une passion pour nourrir l’esprit, le corps et l’âme, et continuer à mettre son talent au service d’une « profession de soin ». Les lieux de travail peuvent parfois être démotivants et la politique, vraiment rude; il faut donc trouver à maintenir son énergie! Pour ma part, la formule magique est de partager mes connaissances et de continuer à apprendre.

Qu’est-ce qui vous a motivée à faire partie du corps professoral de l’École des sciences infirmières Ingram?

À l’automne de 2018, j’ai fêté 25 ans de carrière en enseignement à l’Université McGill! Je dois mes débuts à Evelyne Malowany, alors directrice des soins infirmiers à l’HME, qui m’a incitée à postuler pour ce qu’on qualifiait à l’époque de membre auxiliaire du corps professoral. Je me souviens avec bonheur de l’entrevue, que présidait la professeure Margaret Hooton dans la salle de cours du pavillon Wilson. Tandis que je répondais au comité, Evelyne était assise à mes côtés, tellement proche – pour me soutenir – que je l’entendais respirer. Le comité me questionnait sur ce que je désirais enseigner, et sur la nature de ma contribution à l’école de sciences infirmières. Depuis, j’ai enchaîné les postes de chargée de cours, de professeure adjointe et de professeure agrégée. J’ai donné des cours à des étudiants de premier cycle en contexte clinique, dans de grandes salles de cours et maintenant, depuis plus de dix ans, à des étudiants des cycles supérieurs, plus particulièrement dans le cadre de cours liés au perfectionnement professionnel en soins infirmiers.

Alors que j’étais directrice associée des soins infirmiers au Centre universitaire de santé McGill (CUSM) de la Mission concernant la santé des femmes (1999-2012), j’ai enseigné au Département d’obstétrique et de gynécologie. En 2012, j’ai renoncé à ce rôle, et vers la fin de mes études de doctorat, j’ai choisi de poser ma candidature au poste de directrice associée des soins infirmiers au CUSM, pour le perfectionnement clinique et professionnel du personnel. Cette expérience m’a permis de m’intéresser aux défis de la formation continue du personnel infirmier en milieux de pratique. L’année précédant le déménagement du CUSM au site Glen au printemps de 2015, j’ai pu faire des incursions dans les stratégies d’apprentissage en ligne, et collaborer à l’obtention d’un système de gestion de l’apprentissage pour que le personnel de l’organisation ait accès à de l’apprentissage en ligne depuis le domicile et les multiples sites concrets du CUSM.

À l’été de 2016, l’École des sciences infirmières Ingram a diffusé une annonce de recrutement de nouveaux professeurs et, à l’approche de plus de trois décennies dans des hôpitaux universitaires, j’ai décidé de plonger dans l’enseignement à temps plein. Je quittais un endroit très familier pour un nouveau lieu, où je savais que je trouverais des éducateurs attachés aux mêmes valeurs et principes quant aux rôles et responsabilités des professionnels de la santé. Pour ce dernier chapitre de ma carrière, je désirais partager mes connaissances « en amont » en travaillant exclusivement avec des infirmières et d’autres apprenants qui occuperont des postes déterminants à l’avenir dans cet environnement complexe et exigeant des services de santé.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre travail?

J’adore l’esprit créatif des étudiants et leur attitude dynamique. Leur potentiel est énorme et prometteur. J’apprécie le milieu universitaire, où le savoir est une valeur commune et l’innovation est favorisée, de même que sortir des schémas habituels de pensée. Mes collègues de l’ÉSII sont une source quotidienne d’inspiration, notamment en enseignement, alors que je m’efforce de devenir une meilleure pédagogue. Je tire profit des champs d’intérêt en recherche des collègues de l’ÉSII, et de faire partie de cette communauté d’investigation. La Faculté de médecine et l’Université McGill disposent de diverses ressources pour aider le corps professoral. Les investissements en ressources financières et humaines sont nombreux, et maints ateliers et conférenciers invités traitent de différents sujets. J’ai assisté à de remarquables présentations, entre autres sur les principes autochtones du savoir, l’intelligence artificielle et les politiques d’immigration du Canada.

À votre avis, quels sont les aspects de la profession d’infirmière en général que les gens doivent connaître? Et au sujet du perfectionnement en leadership et du mentorat?

Cette profession est extraordinaire et le personnel infirmier est, et peut être, un acteur majeur du leadership en matière de santé. Or, comme profession collective, nous n’avons pas encore saisi cette occasion. Notre histoire en tant que profession principalement féminine et le manque d’accès à l’enseignement supérieur (au Québec et mondialement), pour l’ensemble des infirmières autorisées, ont limité notre croissance comme contributeur dynamique sur la scène mondiale en santé.

Il faut que les infirmières en exercice et la génération émergente des futurs chefs de file de notre profession prennent la parole, ainsi que leur place à la table. De même, nous devons avoir la possibilité d’être reconnus par les décideurs à tous les échelons de la société et des gouvernements : d’une part, pour la valeur du personnel infirmier en tant que personnes dignes de confiance, d’autre part, en tant que travailleurs de la connaissance et professionnels de la santé, au-delà du paradigme de prestation de services comme objectif principal.

Le 17 janvier 2019