Le Centre des maladies virales de l’Université McGill, s’appuyant sur l’héritage du Centre SIDA McGill, élargit sa mission à l’ensemble des maladies virales qui menacent la santé humaine

Par Maureen McCarthy

Établi en 1990 sous la direction du regretté Dr Mark Wainberg, le Centre SIDA McGill a joué pendant trois décennies un rôle de premier plan dans la recherche sur le virus de l’immunodéficience humaine (VIH). Aujourd’hui, le Centre devient le Centre des maladies virales de l’Université McGill et ses membres s’apprêtent à entamer un nouveau chapitre de son histoire.

Situé à l’Institut Lady Davis de l’Hôpital général juif, le Centre SIDA McGill s’est bâti une renommée internationale grâce à des découvertes révolutionnaires qui ont radicalement transformé les résultats thérapeutiques des personnes atteintes du VIH dans le monde entier. Au début des années 1990, le Dr Wainberg et ses collègues ont été les premiers à reconnaître l’activité anti-VIH-1 du 3TC et à tester ce médicament sur des patients humains. C’est aussi au laboratoire du Dr Wainberg que l’on a démontré l’activité anti-VIH-1 supérieure du dolutégravir. Ces deux médicaments font encore partie des régimes de traitement antirétroviral de première ligne.

Beaucoup d’autres membres du Centre ont aussi apporté une contribution importante à la recherche, notamment la Dre Catherine Hankins, ancienne directrice associée du Centre et actuelle coprésidente du Groupe de travail sur l’immunité face à la COVID-19, qui a été à l’avant-garde de la recherche sur le VIH dans les populations à risque élevé. Les recherches du Pr Nahum Sonenberg ont mené à une découverte révolutionnaire sur les mécanismes moléculaires derrière la régulation de la traduction dans les cellules et les virus. Enfin, le Dr Norbert Gilmore, maintenant membre émérite du Centre, est devenu un spécialiste renommé du VIH et du SIDA et un ambassadeur des droits des personnes porteuses du VIH.

Une transformation entamée depuis longtemps

Si la recherche sur le VIH a mené à la création du Centre, ses activités ont pris de nouvelles directions il y a une décennie, quand les membres ont commencé à étudier d’autres virus qui représentent de graves menaces pour la santé mondiale. Les scientifiques du Centre ont monté des programmes de recherche dans des domaines comme la virologie fondamentale, l’immunologie, la découverte de médicaments, l’épidémiologie, les études populationnelles et la recherche clinique. Cette évolution de l’expertise du Centre a mis en évidence la nécessité de lui donner un nouveau nom, tout en redéfinissant la vision et la mission qui sous-tendent les travaux qu’on y réalise.

« Mark Wainberg a été un pionnier, autant au laboratoire que sur le terrain; ses recherches transformatrices et son activisme extraordinaire ont eu une influence inestimable sur la vie de millions de personnes », affirme le Dr David Eidelman, vice-principal (Santé et affaires médicales) et doyen de la Faculté de médecine et des sciences de la santé de McGill. « Il avait prédit il y a longtemps que l’étude d’autres pathogènes viraux importants s’inscrirait dans les travaux du Centre. Je sais que Mark serait comblé de voir cette vision devenir une réalité. »

 

C’est en 2017 qu’a officiellement commencé le processus d’expansion du Centre et de redéfinition de sa mission pour combattre toutes les maladies virales qui menacent la santé publique. Pourtant, la portée des activités du Centre se transformait déjà depuis longtemps. Autour de 2010, beaucoup des laboratoires qui avaient été mis en place au départ pour étudier le VIH ont élargi leur champ d’activité pour découvrir des traitements contre d’autres virus émergents, comme le virus Zika, celui de la dengue et le virus Ebola. Au fil du temps, les chercheurs du Centre se sont aussi intéressés aux virus de l’hépatite, de l’herpès, du papillome humain (VPH) et de l’influenza. Par exemple, les travaux du Pr Eduardo Franco ont permis de comprendre le rôle du VPH dans le développement du cancer du col de l’utérus, et ceux de la Dre Marina Klein à la tête du projet communautaire « Montréal sans HepC » visant à faire de Montréal la première ville d’Amérique du Nord à éradiquer le virus de l’hépatite C. Cette année, de nombreux laboratoires affiliés au Centre se sont tournés vers l’étude du SRAS-CoV-2, le virus responsable de la COVID-19. Plus récemment, le Dr Brian Ward a dirigé la mise au point d’un vaccin contre la COVID-19 produit dans des plantes, qui en est à l’étape de l’essai clinique de phase II.

Le Pr Chen Liang, qui est arrivé au Centre en 1995 pour faire des recherches postdoctorales sous la direction du Dr Wainberg, en est aujourd’hui le directeur intérimaire – un poste qu’il occupe depuis le décès prématuré du Dr Wainberg, qui s’est noyé en 2017. Le Pr Liang lui-même est un spécialiste du VIH de réputation internationale. Son laboratoire travaille sur les facteurs de restriction (FR), des protéines antivirales innées qui constituent la première ligne de défense de l’organisme contre les virus. Il a découvert deux des rares FR connus, IFITM et MxB, qui sous-tendent les principaux mécanismes innés de protection contre le VIH-1 et il a été l’un des premiers à étudier l’utilisation de la méthode d’édition génomique CRISPR pour guérir l’infection au VIH.

Comme beaucoup d’autres chercheurs, le Pr Liang s’est récemment tourné vers la recherche sur la COVID-19. Il a d’ailleurs reçu une subvention des Instituts de recherche en santé du Canada lors d’une première ronde de financement. De plus, avec Stephen Yue, professeur de génie à McGill, il collabore à un autre projet qui est financé par les subventions Alliance du CRSNG relatives à la COVID-19. Le Pr Liang a aussi joué un rôle central dans la création des deux laboratoires de niveau de confinement 3 de McGill, qui sont utilisés pour la recherche sur la COVID-19.

Avancer ensemble, pour le bien de l’humanité

Le Centre SIDA McGill, qui s’appelle maintenant le Centre des maladies virales de l’Université McGill, fait partie de l’Initiative interdisciplinaire en infection et immunité de McGill (MI4). « MI4 a mobilisé énormément de ressources à McGill pour soutenir la recherche sur la COVID-19, dit le Pr Liang. Plusieurs membres de notre Centre ont reçu du financement ou du soutien collaboratif de MI4. Nous avons eu beaucoup de chance de profiter de l’environnement diversifié et interdisciplinaire créé par MI4. Tout cela nous place dans une excellente position pour trouver des solutions à la pandémie de COVID-19. »

« MI4 a été créé pour rassembler des chercheurs talentueux provenant de plus d’une dizaine de programmes et centres de McGill afin d’élaborer de nouvelles solutions pour lutter contre les maladies infectieuses et immunitaires et de fournir ces solutions aux patients et aux populations qui en ont le plus besoin, explique le Dr Don Sheppard, directeur de MI4. Le Centre SIDA McGill a toujours été un élément vital de notre réseau et il joue un rôle essentiel dans nos recherches pour combattre la COVID-19. Maintenant qu’il a été renommé Centre des maladies virales de l’Université McGill et doté d’une nouvelle mission, ses membres continueront à tirer parti des importantes percées réalisées depuis des décennies et se joindront à d’autres scientifiques de notre communauté pour contrer les menaces des maladies virales – de la COVID-19 jusqu’à l’hépatite C – et contribuer à nous préparer à la prochaine pandémie. »

Le Pr Liang soutient qu’en élargissant sa mission pour étudier non seulement le VIH, mais tous les virus importants, le Centre franchit un jalon important qui reflète l’héritage du Dr Wainberg.

« L’élargissement de la portée du Centre SIDA McGill rend hommage de belle façon à son fondateur, Mark Wainberg, et à l’équipe exceptionnelle de chercheurs et chercheuses qu’il a rassemblée et encadrée à l’Institut Lady Davis », souligne le Dr Roderick McInnes, qui a succédé au Dr Wainberg en tant que directeur de l’Institut. « Leurs réalisations formidables sont à jamais indissociables de la lutte contre le SIDA et les conséquences désastreuses de la pandémie de maladie à coronavirus nous rappellent cruellement à quel point il est important que leur travail se poursuive. »

« En tant que futur directeur de l’Institut Lady Davis, je tiens à exprimer mes sincères félicitations à tous ceux et celles qui ont contribué à la création du Centre des maladies virales de l’Université McGill », ajoute le Pr Stephen Robbins, qui prendra la relève du Dr McInnes à la direction de l’Institut Lady Davis en janvier. « La pandémie qui nous frappe en ce moment fait ressortir l’importance du Centre et sa vision. C’est aussi une occasion pour la communauté de la recherche d’unir ses forces afin de combattre cette maladie et d’autres maladies dévastatrices. »

Maintenant que le Centre est rebaptisé, ses membres, en collaboration avec MI4 et la grande communauté scientifique de McGill, continueront à chercher des solutions pour combattre non seulement la COVID-19, mais aussi d’autres maladies virales. Grâce à la recherche et à l’éducation, leur objectif est de mieux nous préparer à affronter d’éventuelles autres pandémies, pour le bien de la planète entière. D’autres grandes nouvelles au sujet du Centre sont à venir dans le cadre des célébrations du bicentenaire de McGill, en 2021.