Par Diane Weidner, Centre de simulation et d’apprentissage interactif Steinberg

Chacun sait qu’un mode de vie sain, mariant activité physique et bonnes habitudes alimentaires, est la stratégie idéale pour garder un poids santé. Or il nous arrive de ne pas toujours garder le bon cap et, pour diverses raisons, de prendre des kilos. En 2017, selon Santé Canada, 34 % des Canadiens adultes étaient en surpoids et 27 % étaient obèses, avec un indice de masse corporelle (IMC) de 30 ou plus.

L’obésité morbide, caractérisée par un IMC anormalement élevé de 40 ou plus, est liée à nombre de maladies chroniques, dont le diabète, les maladies cardiovasculaires et le cancer. L’obésité sévère ne procède pas d’un seul manque de maîtrise de soi; il s’agit d’un problème beaucoup plus complexe.

On entend parler de l’aspect évitable de l’obésité, mais qu’en est-il de son traitement?

Le chirurgien en bariatrie Zvi H. Perry désire faire mieux connaître les options chirurgicales pour les patients obèses. « Avec plus de 4 millions de décès par an, l’obésité tue plus que les armes à feu dans le monde entier », souligne-t-il. « Presque toutes les maladies chroniques sont associées à l’obésité. Plus de 70 % des personnes atteintes de diabète de type 2 sont obèses. Et que dire de l’hypertension, des maladies cardiovasculaires, de l’AVC, du cancer, de l’infertilité, de l’apnée du sommeil, de problèmes psychosociaux, des varices… et j’en passe. »

Venu à McGill en 2017 aux fins d’un fellowship clinique d’un an en chirurgie bariatrique, le DPerry a travaillé avec des chirurgiens de renommée mondiale à l’Hôpital général de Montréal du Centre universitaire de santé McGill (CUSM), dont les docteurs Olivier Court, Amin Andalib et Sebastian Demyttenaere. « J’ai eu la chance d’apprendre de ces mentors, de comprendre de quelle façon, quand et pour qui la chirurgie bariatrique convient », dit-il. « La recherche montre qu’il s’agit du traitement de l’obésité morbide dont les effets sont les plus durables. Or seul un pour cent des personnes concernées sont informées de cette option. Les avantages qui découlent d’une chirurgie bariatrique sont pourtant considérables. Les patients peuvent vivre en meilleure santé et plus longtemps, et accroissent de près de 10 ans leur espérance de vie. Ça change vraiment une vie. »

Voici quelques-uns des avantages avérés qu’on associe à la chirurgie bariatrique.

La chirurgie bariatrique a évolué

« Il y a quelques années, la chirurgie bariatrique nécessitait une opération ouverte et de larges incisions; les taux de réussite étaient inférieurs et les taux de complications, supérieurs », explique le DPerry. « Les gens avaient peur de l’intervention et y associaient douleur et souffrance. Les choses ont bien changé. De nos jours, les chirurgies bariatriques sont presque toutes effectuées au moyen d’un laparoscope introduit par de petites incisions. L’intervention minimalement effractive se traduit par un rétablissement plus rapide et beaucoup moins de complications. »

Au CUSM, on pratique trois types de chirurgie bariatrique par laparoscopie : la gastrectomie pariétale, la dérivation gastrique Roux-en-Y, et la dérivation biliopancréatique avec commutation duodénale. Ces interventions consistent à réduire l’estomac pour que le patient se sente rassasié plus vite et mange moins, ou produisent une malabsorption, causée par la dérivation de l’intestin. Les deux entraînent une perte graduelle de poids. Au CUSM, les patients qui subissent une chirurgie bariatrique sont bien entourés. Un chirurgien leur décrit les différents types d’intervention, une diététiste leur explique les changements nutritionnels à faire avant et après l’opération, et une infirmière praticienne leur fournit un échéancier et des conseils pratiques. D’autres ressources contribuent à favoriser les changements à long terme aux habitudes de vie, notamment des consultations en psychologie, physiothérapie, chirurgie plastique, endocrinologie ou avec d’autres spécialistes, selon les besoins du patient. « Lorsque vous avez une chirurgie bariatrique, toute une équipe s’implique. Le patient doit être suivi par des spécialistes qui le prennent en charge. Nous constatons des résultats supérieurs à long terme pour les patients avec cette approche d’équipe », ajoute le Dr Perry.

Au Québec, la chirurgie bariatrique est pleinement couverte par la RAMQ pour les patients admissibles. Cela comprend les patients avec un IMC de plus de 40, ou un IMC de plus de 35 accompagné de maladies concomitantes liées à l’obésité, comme le diabète, l’apnée du sommeil ou l’hypertension. Renseignements : https://mcgill.ca/x/ZNq

Éduquer le personnel médical qui traite l’obésité

Après s’être perfectionné en chirurgie bariatrique, le Dr Perry a fait un fellowship clinique en simulation chirurgicale au Centre de simulation et d’apprentissage interactif Steinberg (CSAIS) de McGill, en vue de contribuer à un programme de formation en médecine de l’obésité. « Il est primordial de mieux former le personnel médical qui traite l’obésité. L’approche aux patients obèses, l’évaluation chirurgicale et le traitement postopératoire sont mal compris et étudiés. Tous les professionnels de la santé doivent être mieux informés des besoins particuliers des patients obèses », dit-il.

De concert avec des membres du corps professoral et des collègues du Centre de chirurgie bariatrique de McGill, du Département de chirurgie et du CSAIS, le Dr Perry a réalisé une évaluation des besoins. Le but était de mieux comprendre ce qui est enseigné aux étudiants, résidents et fellows en médecine de l’obésité et de déterminer les méthodes éducatives qui répondraient le mieux aux besoins.

Au cours de la dernière année, le Dr Perry a collaboré avec le Dr David Fleiszer et la Pre Nancy Posel à un projet soutenu par l’Unité d’informatique médicale Molson de McGill. Ils ont conçu trois patients virtuels, un cours et deux cas afin de mettre l’accent sur l’identification, le diagnostic, les risques et le traitement initial associés à l’obésité morbide. « Mes illustres mentors m’ont appris que la très complexe prise en charge de patients obèses nécessite un travail d’équipe, et qu’il est plus important d’agir avec prudence que vite. Je souhaite transmettre ces connaissances pour que les chirurgiens qui opèrent des patients obèses le fassent avec efficacité et sans risque. S’exercer avec un patient virtuel est beaucoup plus agréable que d’avoir à lire un manuel technique de 400 pages. »

La Pre Posel est tout à fait d’accord : « Cette stratégie novatrice s’appuie sur l’intégration de patients virtuels au Centre de simulation (un apprentissage qu’on qualifie souvent de mixte). À l’ère numérique, elle enrichit et améliore l’enseignement et l’apprentissage, présente un bon rapport coût-efficacité et démultiplie de précieuses ressources. »

L’objectif du Dr Perry est d’appliquer ce modèle à McGill et au-delà, de faire partie d’un réel changement et de voir des résultats et un impact concrets sur l’expérience des patients dans des coins du monde où l’accès aux ressources et au savoir-faire en simulation qui sont à notre disposition ici reste une rareté.

Le 4 juillet 2019