Né à Montréal, Michael Malus a obtenu son diplôme de médecine à l’Université McGill en 1963. L’Université n’offrant pas de programme de médecine familiale à l’époque, il a décidé de faire six mois de formation en médecine interne à l’Hôpital Royal Victoria, suivis de six mois de pédiatrie à l’Hôpital de Montréal pour enfants et de trois mois d’obstétrique et de gynécologie à l’Hôpital général juif. Après sa résidence, il est devenu médecin de famille, travaillant pour le gouvernement fédéral à Fort Rae, sur le Grand lac des Esclaves dans les Territoires du Nord-Ouest, puis pendant deux ans pour le Indian Health Service des États-Unis, sur une réserve apache à Mescalero, au Nouveau-Mexique. Il est ensuite revenu exercer au Québec, établissant son cabinet de médecine de famille sur sa ferme à Sawerville, dans les Cantons-de-l’Est. Dans tous ces lieux de pratique, le Dr Malus a pris conscience que les milieux socioéconomiques difficiles provoquaient souvent chez les adolescents des problèmes de santé mentale pouvant mener à des tendances suicidaires.

Le Canada au quatrième rang des pays industrialisés pour le taux de suicide chez les jeunes

Selon un rapport de l’UNICEF publié en 2020, la santé mentale et le bonheur chez les jeunes du Canada connaissent une détérioration par rapport à d’autres pays à revenu élevé. Si le Canada s’est classé 31e sur 38 pays pour les mesures du bien-être, et 30e pour la santé physique, c’est son classement sur les taux de suicide chez les jeunes, 35e sur 38, qui suscite les plus sérieuses appréhensions. Statistique Canada souligne en outre que ce risque n’est pas également partagé et que les adolescents des communautés des Premières Nations et métisses et des régions inuites sont particulièrement vulnérables.

« Je voulais travailler là où on avait besoin de moi et j’ai trouvé que la confusion et l’angoisse des jeunes, ainsi que celles d’autres groupes d’âge, étaient une réponse barométrique au changement socioéconomique. Pendant la pandémie, avec les fermetures d’écoles et l’arrêt des activités sociales, l’angoisse des jeunes est devenue capitale, tout comme la pénurie des ressources pour y faire face », explique le Dr Malus.

Aujourd’hui, la pandémie a mis en lumière cette crise de santé mentale suite à un nombre sans précédent de fermetures d’écoles dans le monde. Des facteurs tels que le manque de contact avec les pairs et les enseignants, la peur que des proches meurent ou vivent des problèmes de santé et le manque de structure au quotidien ont contribué à une augmentation de l’anxiété, de la dépression et des problèmes de comportement chez de nombreux enfants et jeunes (Fegert et al. 2020).

Herzl crée une unité de santé pour adolescents

Après avoir exercé en région, le Dr Malus est revenu à Montréal pour devenir directeur du Centre de médecine familiale Herzl de l’Hôpital général juif, où il a travaillé pendant 22 ans. Il se considère privilégié d’être arrivé au Centre Herzl en 1982, au sein d’un groupe très dynamique, dans cette clinique qui a connu ses débuts comme dispensaire à quai offrant des soins essentiels aux immigrants arrivant au Canada. Prodiguant des soins médicaux de base à une communauté aux moyens limités, le Centre Herzl est resté pendant 40 ans la seule clinique médicale gratuite à Montréal. Le personnel du Centre a été le pionnier d’une approche collaborative, qui comprenait des médecins, des infirmières, des travailleurs sociaux et des spécialistes paramédicaux. La profession d’infirmière praticienne spécialisée existait au Centre bien avant que cette désignation ne devienne officielle. Après la genèse du Centre Herzl, dans les années qui ont précédé la Première Guerre mondiale, les médecins qui y exerçaient ont également contribué à diriger la création de l’Hôpital général juif.

Aujourd’hui, le Centre de médecine familiale Herzl offre une gamme complète de services médicaux et sociaux à une clientèle des plus diversifiées, composée de plus de 55 000 patients de tous les horizons. Intégré à un hôpital d’enseignement moderne affilié à la Faculté de médecine et des sciences de la santé de l’Université McGill, le Centre est un milieu de formation réputé pour les médecins de famille affiliés au Département de médecine de famille de McGill. Il comprend une unité d’allaitement pour les mères qui ont besoin de conseils en lactation, une clinique de méthadone pour aider les personnes aux prises avec une dépendance, une clinique prénatale où ont lieu des centaines d’accouchements par année, et le seul service de consultation psychologique gratuit pour adolescents à Montréal.

« L’objectif du Centre Herzl est de fournir des soins complets et de montrer aux résidents toute la fierté de faire partie d’une équipe. Une approche d’équipe est la seule façon de fournir des soins de santé à notre population vieillissante ayant des problèmes médicaux complexes et aux patients de tous âges avec leurs besoins psychologiques et sociaux », explique le Dr Malus.

L’une des principales réalisations du Dr Malus lorsqu’il dirigeait le Centre Herzl a été la création et la supervision d’une unité de santé pour adolescents. Créée en 1985, cette unité offre des services de proximité dans les écoles secondaires de Montréal et offre un soutien médical et psychologique gratuit aux jeunes de 13 à 19 ans. Les services vont des soins médicaux de base et de la santé reproductive à des problèmes tels que la dépression, le stress, l’anxiété, la toxicomanie, les troubles alimentaires et le suicide. Une fois par semaine, des médecins, des résidents et des infirmières de Herzl visitent une école secondaire de Montréal et organisent des discussions en classe avec des adolescents sur les problèmes de santé. Ils répondent aux questions anonymes ou directes et distribuent leurs coordonnées pour les étudiants qui souhaitent une aide médicale ou psychologique. Le programme est entièrement financé par des dons privés.

« Lors de l’évaluation des patients adolescents, nous leur demandons souvent s’ils ont une idée de ce qu’ils veulent faire comme carrière. Un adolescent m’a dit un jour : «Je veux être cascadeur, ou médecin». Pour moi ce n’est pas un paradoxe. Avec les complexités et les pénuries de notre système de santé, je me sens comme un cascadeur tous les jours de ma vie et Herzl est mon filet de sécurité », explique le Dr Malus.

Thérapie cognitivo-comportementale pour les conseillers scolaires

Aujourd’hui, l’unité de santé pour adolescents du Centre Herzl lance un tout nouveau projet pour les conseillers en milieu scolaire. « Nous avons toujours considéré les conseillers d’orientation dans les écoles comme des héros des soins de première ligne, aidant les adolescents aux prises avec des problèmes accablants », explique le Dr Malus. Ce nouveau projet offrira un soutien aux conseillers d’orientation des écoles secondaires en leur offrant une série de cours qui leur enseigneront les bases de la thérapie cognitivo-comportementale (TCC). Si les psychologues de l’unité de santé des adolescents du Centre Herzl continueront d’offrir une TCC formelle à leurs nombreux jeunes patients, ils espèrent que le projet aidera les conseillers en milieu scolaire à aborder de manière efficace les problèmes de santé mentale des élèves. Le Dr Malus et son équipe sont actuellement en contact avec diverses écoles de Montréal et souhaitent lancer le projet à l’automne.