Une nouvelle étude réalisée par la Division d’épidémiologie du cancer de l’Université McGill évaluera une méthode révolutionnaire de prévention de la transmission du virus du papillome humain (VPH) reposant sur l’application d’un gel topique lors de relations sexuelles.
Dans le cadre de l’étude comparative CATCH (Carrageenan-gel Against Transmission of Cervical HPV – Gel de carraghénine contre la transmission du VPH cervical), réalisée à double insu et avec randomisation, plus de 450 femmes recevront soit un gel actif à base de carraghénine (extrait d’algue marine), soit un gel placebo. L’équipe de recherche est dirigée par le Pr Eduardo Franco, directeur de la Division d’épidémiologie du cancer, et l’étude sera coordonnée par le doctorant Joseph Tota.
« Des résultats positifs ouvriraient la voie à une méthode révolutionnaire de prévention du cancer, explique le Pr Franco. De spectaculaires progrès seraient accomplis si les femmes pouvaient se protéger contre l’infection par le VPH et le risque de cancer du col de l’utérus seulement en appliquant un gel médicinal présenté comme un lubrifiant personnel. Chaque année, 250 000 femmes meurent du cancer du col de l’utérus et de nombreuses autres doivent recevoir des traitements douloureux et coûteux pour la prise en charge de lésions précancéreuses et cancéreuses. Cette nouvelle méthode pourrait réduire considérablement ces statistiques alarmantes. »
Les outils disponibles pour lutter contre la transmission du VPH demeurent limités. Les vaccins commercialisés récemment ne confèrent pas une protection contre tous les types cancérigènes de VPH et ne protègent pas les femmes déjà infectées par le virus. Ces vaccins sont en outre trop coûteux pour les populations de nombreuses régions du monde, qui sont aussi celles où l’on dénombre le plus de victimes du cancer du col de l’utérus. Des études ont démontré que le port du condom ne permet pas toujours de prévenir efficacement la transmission de l’infection par le VPH, contrairement à d’autres maladies transmissibles sexuellement. Un gel topique que les couples pourraient appliquer avant et pendant les relations sexuelles règlerait bon nombre de ces problèmes.
Le recours à un gel topique comme barrière contre l’infection s’est imposé lorsque les résultats d’une étude réalisée par l’Institut national du cancer des États-Unis à Bethesda, au Maryland, ont révélé que la carraghénine, un type de polysaccharide sulfaté, est un puissant inhibiteur du VPH. Le chercheur John Schiller et son équipe du Laboratoire d’oncologie cellulaire ont réalisé des études sur des cellules cultivées et des modèles animaux. Ils ont ainsi découvert que les propriétés anti-infectieuses de la carraghénine agissent contre de nombreux types de VPH, y compris ceux que l’on sait cancérigènes. Pour les besoins de l’étude CATCH, le Pr Franco et ses collaborateurs ont choisi d’utiliser le produit qui, selon les résultats des essais réalisés par M. Schiller, offre la plus forte activité inhibitrice contre le VPH.
« Je suis ravi que le Pr Franco, l’Université McGill et les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) permettent à notre étude initiale de franchir une nouvelle étape en testant chez l’humain les résultats que nous avons obtenus en laboratoire, affirme John Schiller. Nos travaux ont révélé qu’un gel à base de carraghénine pourrait constituer un microbicide topique à large spectre efficace contre les types de VPH transmissibles sexuellement. Un tel produit serait un excellent complément aux programmes de vaccination et répondrait aux besoins des populations pour lesquelles la vaccination ne peut être envisagée. »
Selon les Centres de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis, le VPH est la maladie transmissible sexuellement la plus répandue dans le monde. L’étude HITCH (HPV Infection and Transmission in Couples through Heterosexual activity – Infection et transmission du VPH par l’activité sexuelle chez les couples) réalisée à McGill en 2010 a révélé que plus de la moitié (56 pour cent) des jeunes adultes qui avaient un nouveau partenaire sexuel étaient infectés par le VPH. De ce nombre, près de la moitié (44 pour cent) étaient infectés par un type cancérigène de VPH. L’Organisation mondiale de la Santé (OMS) estime que 529 828 femmes reçoivent un diagnostic de cancer du col de l’utérus chaque année et que 275 128 en meurent – ce qui en fait le deuxième type de cancer le plus répandu chez les femmes de 15 à 44 ans.
Le VPH est transmis par contact sexuel et le cancer du col de l’utérus est causé par des infections persistantes par certains types de VPH. L’infection par le VPH peut également entraîner le cancer de l’anus, de la vulve, du vagin, du pénis, de la bouche et de la gorge. L’OMS estime que de 15 à 20 pour cent des 400 000 nouveaux cas de cancers de la tête et du cou diagnostiqués chaque année sont associés au VPH, et des preuves de plus en plus nombreuses permettent d’étayer l’existence d’un lien entre ces cancers et les relations sexuelles buccogénitales.
Pour les besoins de l’étude CATCH, les chercheurs recruteront 465 femmes qui recevront soit un gel actif à base de carraghénine, soit un gel placebo qu’elles devront appliquer lors de relations intimes. Au cours de la période de suivi d’un an, les sujets devront se présenter en clinique afin que l’on évalue les taux d’infection par le VPH. Les femmes souhaitant participer à cette étude sont invitées à communiquer avec Mme Allita Rodrigues, à catch.study@mcgill.ca, pour obtenir de plus amples renseignements.
Cette étude est financée par les IRSC.
Pour plus d’information sur l’étude CATCH, visitez le site suivant : www.mcgill.ca/catch/fr.
Couverture sur le sujet (en anglais)
The Gazette
Cosmopolitan
La Presse (vidéo en français)
January 10, 2013