« Il est en effet plus compliqué de chercher un petit nombre de biomarqueurs génétiques, que l’on peut cibler pour empêcher les cellules oncogènes de proliférer, étant donné la capacité de la tumeur de progresser et de développer une résistance aux agents thérapeutiques », affirme le Dr Bruce Gottlieb, membre du laboratoire du Dr Mark Trifiro à l’Institut Lady Davis de l’Hôpital général juif.
Ces résultats, publiés dans la revue Human Mutation, portent à croire que la clé pour lutter contre le cancer du sein ne se limite pas à identifier des biomarqueurs génétiques précis, mais aussi à acquérir une compréhension plus approfondie des pressions de sélection qui provoquent des changements génétiques, lesquels permettent aux cellules malignes de proliférer. Le cancer du sein offre une excellente possibilité d’étudier comment l’hétérogénéité génétique innée peut contribuer à la résistance des cellules cancéreuses, car 95 % des cas surviennent après la ménopause lorsqu’une femme subit des changements hormonaux importants relatifs à sa production d’androgènes (hormones mâles) et d’œstrogènes (hormones femelles).
« Je suis convaincu que la variation génétique commence au stade très précoce du développement de l’être humain et qu’elle est suivie d’un processus de sélection naturelle, poursuit le Dr Gottlieb. À mesure que nous vieillissons, différentes variations sont sélectionnées en réaction à certains changements de notre microenvironment tissulaire qui, manifestement, risquent d’être fortement influencés par notre environnement extérieur. La présente étude suggère que les changements hormonaux postménopausiques entraînent la sélection d’une variante de l’androgène préexistante qui, à son tour, permet aux cellules du sein de devenir malignes. »
Selon le chercheur, les cancers deviennent résistants aux agents chimiothérapeutiques à cause des pressions de sélection qu’exerce le microenvironment tissulaire sur des variantes préexistantes au lieu d’acquérir de nouvelles mutations dans un certain gène, souvent dans un délai très court. En effet, en ayant recours au séquençage ultra profond, on a commencé à constater pour la première fois qu’il peut y avoir de multiples variantes génétiques d’un seul gène chez un individu, plutôt qu’une ou deux variantes, comme nous l’avait laissé entrevoir notre compréhension traditionnelle de la génétique.
« Cela revient à dire que nous devrons créer un profil génétique beaucoup plus complexe de chaque patient atteint de cancer, chez qui il faudra comparer non seulement la présence de variantes génériques, mais aussi leur fréquence dans certains tissus malades et tissus sains, indique le Dr Gottlieb. Fort probablement qu’une véritable approche personnalisée du traitement du cancer sera à la recherche de facteurs précis qui sélectionnent un ensemble de variantes génétiques déterminées, et ce, pour chaque cas de cancer. »
L’article, intitulé Making Sense of Intratumor Genetic Heterogeneity: Altered Frequency of Androgen Receptor CAG Repeat Length Variants in Breast Cancer Tissues, a été rédigé par le Dr Gottlieb en collaboration avec Carlos Alvarado, Chunlin Wang, Baback Gharizadeh, Farbod Babrzadeh, Brent Richards, Gerald Batist, Mark Basik, Lenore K. Beitel, et Mark Trifiro. Publié dans la revue Human Muation, l’article est accessible en ligne.