Le monde est actuellement témoin d’une éclosion du nouveau coronavirus qui s’est déclarée dans la ville de Wuhan, en Chine, à la fin décembre 2019. Ce nouveau coronavirus, nommé nCoV-2019, a d’abord été isolé chez trois patients de Wuhan souffrant de symptômes respiratoires sévères. Le virus s’est déjà propagé de Wuhan à d’autres grandes villes et provinces chinoises, ainsi qu’à d’autres pays. Pour cette raison, le 30 janvier, l’Organisation mondiale de la Santé a déclaré l’épidémie une urgence de santé publique de portée internationale.

Les coronavirus ne sont pas nouveaux : tous se souviennent du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) et du SRMO (syndrome respiratoire du Moyen-Orient). L’épidémie liée au coronavirus du SRAS (SRAS-CoV) s’est propagée à 27 pays de novembre 2002 à juillet 2003, infectant 8096 personnes, dont 774 en sont décédées. Dix ans plus tard, en 2012, le SRMO-CoV a émergé, touchant 2494 personnes et faisant 858 victimes. Aujourd’hui, près de deux décennies après le SRAS, le nCoV-2019 a fait le saut chez l’humain et cause une nouvelle épidémie.

Le nombre de cas d’infections au nCoV-2019 augmente rapidement. En date du 2 février 2020, 17 384 cas confirmés ont été rapportés, et 362 personnes sont mortes de l’infection. Le Canada compte quatre cas confirmés, dont trois en Ontario et un en Colombie-Britannique. On a aussi confirmé que l’escalade de l’épidémie est due à la transmission de personne à personne du nCoV-2019. Le gouvernement chinois a mis en place des mesures strictes pour contenir et contrôler cette éclosion de coronavirus. Jusqu’à maintenant, seuls des cas sporadiques ont été rapportés ailleurs qu’en Chine.

On connait depuis longtemps des coronavirus qui causent chez l’humain un rhume ordinaire, aux symptômes légers. Les nouveaux coronavirus, en revanche – les SRAS-CoV, SRMO-CoV et nCoV-2019 –, sont hautement pathogènes, notamment parce qu’ils résultent d’une transmission des animaux aux humains. Les coronavirus de la chauve-souris sont probablement les réservoirs primaires, mais l’espèce hôte intermédiaire immédiatement responsable de la transmission à l’humain du nCoV-2019 reste à identifier. Les personnes atteintes n’ont donc pas d’immunité individuelle ni de groupe à ces virus provenant des animaux. Pire : ces nouveaux coronavirus peuvent s’attaquer aux voies respiratoires inférieures et causer des symptômes respiratoires sévères, potentiellement mortels.

Malheureusement, aucun traitement ni vaccin homologué n’existe pour l’instant contre le SRAS-CoV, le SRMO-CoV ou le nCoV-2019. Par conséquent, la prévention, le diagnostic rapide et les mesures de quarantaine sont donc essentiels pour enrayer la transmission et la propagation du nCoV-2019. Puisque ce nouveau virus se transmet par contact direct et par gouttelettes (voie aérogène), le port d’un masque et le lavage des mains pourraient donc suffire à en prévenir l’acquisition. Les statistiques actuelles montrent que la plupart des personnes décédées des suites d’une infection à nCoV-2019 sont des patients âgés qui souffraient déjà de problèmes de santé préexistants. Bien que la prudence soit de mise, il est aussi important d’éviter les peurs indues qui pourraient causer la panique et surcharger inutilement le réseau de santé.

Cela dit, il faut être bien préparés. Les agences gouvernementales et de santé doivent rester à l’affût de toute évolution de l’épidémie de nCoV-2019. Les hôpitaux et les cliniques doivent avoir en main des outils diagnostiques rapides et précis, et réserver la capacité nécessaire pour les tests en laboratoire en cas d’éclosion de nCoV-2019 à Montréal ou dans une autre ville canadienne. Il faut aussi poursuivre les recherches pour mieux comprendre ce nouveau coronavirus : d’où il provient, comment il se transmet et se manifeste, et comment prévenir et traiter l’infection.

En réponse à l’intensification de l’épidémie de nCoV-2019, l’Initiative interdisciplinaire en infection et immunité de McGill a lancé un appel de projets pour s’attaquer à cette nouvelle menace. Plus nous en savons sur le nCoV-2019, plus nous pourrons découvrir et développer des mesures efficaces pour prévenir sa transmission et traiter les patients infectés, et ainsi enrayer l’épidémie.

Nous ne savons pas encore comment évoluera l’épidémie au cours des prochains jours, ni l’impact qu’elle aura sur notre société, à différents égards. Mais il est certain que les gouvernements, les professionnels de la santé, les chercheurs, le secteur privé et le grand public devront unir leurs forces pour en venir à bout. Le nCoV-2019 n’est pas le premier coronavirus animal à frayer son chemin chez les humains, et ne sera sans doute pas le dernier. Il s’agit de tirer des leçons du passé pour mieux se préparer pour l’avenir.

Chen Liang, Ph. D.

Professeur, départements de médecine et de microbiologie et immunologie, Université McGill

Chercheur, Institut Lady Davis, Hôpital général juif

Initiative interdisciplinaire en infection et immunité de McGill

Don Sheppard, M.D., FRCP(C)

Directeur, Initiative interdisciplinaire en infection et immunité de McGill

Professeur et directeur, Département de microbiologie et d’immunologie, Université McGill