Une découverte prometteuse semble indiquer que des tests de reconnaissance des odeurs pourraient aider les scientifiques à suivre l’évolution de la maladie chez les personnes à risque

La perte de l’odorat, symptôme précurseur de la maladie d’Alzheimer?

Dès l’apparition des premières pertes de mémoire, il est presque trop tard, puisque les lésions cérébrales associées à la maladie d’Alzheimer évoluent peut-être déjà depuis une vingtaine d’années. C’est pourquoi les scientifiques cherchent à découvrir la façon de déceler la maladie à ses débuts. Leurs travaux donnent maintenant à penser qu’un simple test de reconnaissance des odeurs pourrait permettre de suivre l’évolution de la maladie avant même l’apparition des symptômes, particulièrement chez les personnes à risque.

« Malgré tous les travaux de recherche réalisés dans ce domaine, les scientifiques n’ont pas encore trouvé un traitement efficace contre la maladie d’Alzheimer », souligne le Dr John Breitner, directeur du Centre de recherche en prévention de la maladie d’Alzheimer de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas et coauteur d’une étude sur le sujet publiée récemment dans la revue Neurology. « Toutefois, si nous pouvions retarder l’apparition des symptômes de cinq ans seulement, nous pourrions réduire de plus de 50 % la prévalence et la sévérité de ces derniers. »

Gomme balloune ou essence?

Près de 300 personnes âgées de 63 ans en moyenne et à risque de développer la maladie d’Alzheimer (car un de leurs parents en avait souffert) ont été soumises à des tests à choix multiple consistant à gratter et à sentir des timbres odorants afin de reconnaître la gomme balloune, de l’essence ou du citron. Cent sujets s’étaient portés volontaires pour subir régulièrement des ponctions lombaires afin de mesurer les concentrations de diverses protéines liées à la maladie d’Alzheimer dans le liquide céphalorachidien.

Les chercheurs ont découvert que les sujets qui avaient le plus de difficulté à reconnaître les odeurs étaient  ceux dont les biomarqueurs de la maladie d’Alzheimer étaient les plus anormaux.

« Pour la première fois, des chercheurs ont pu démontrer clairement qu’il existe un lien direct entre la perte de la capacité à reconnaître les odeurs et les biomarqueurs qui témoignent de l’évolution de la maladie », affirme Marie-Elyse Lafaille-Magnan, doctorante à l’Université McGill et auteure principale de l’étude. « Depuis plus de 30 ans, les chercheurs étudient le lien qui existe entre la perte de mémoire et la difficulté qu’ont certains personnes à reconnaître diverses odeurs. Cela semble logique, puisque nous savons que le bulbe olfactif (qui participe à l’odorat) et le cortex entorhinal (qui intervient dans la mémoire et la reconnaissance des odeurs) comptent parmi les premières structures cérébrales touchées par la maladie. »

« Un simple test de reconnaissance des odeurs pourrait donc nous renseigner sur l’évolution de la maladie, tout comme le font actuellement certains tests beaucoup plus invasifs et coûteux portant sur l’analyse du liquide céphalorachidien », affirme Judes Poirier, Ph. D., directeur du Programme de recherche sur le vieillissement, la cognition et la maladie d’Alzheimer de l’Institut Douglas et coauteur de l’étude. « Toutefois, la difficulté à reconnaître les odeurs est parfois symptomatique de problèmes médicaux autres que la maladie d’Alzheimer et, par conséquent, le test de reconnaissance des odeurs ne doit pas remplacer les tests actuels. »

Les chercheurs reconnaissent cependant que des études beaucoup plus poussées seront nécessaires pour déterminer avec précision la nature du lien entre la perte de la capacité à reconnaître les odeurs au fil du temps et l’évolution de la maladie en soi. À l’heure actuelle, les tests de reconnaissance des odeurs ouvrent simplement une nouvelle piste de recherche aux scientifiques qui s’efforcent de trouver le moyen de déceler la maladie avant l’apparition des symptômes.

L’article « Odor identification as a biomarker of preclinical AD in older adults at risk », par Marie-Elyse Lafaille-Magnan, B. Sc., M. Sc., et coll., a été publié dans la revue Neurology.

Cette étude a été financée par Pfizer Canada, la Fondation canadienne pour l’innovation, le Fonds de recherche du Québec – Santé, la Fondation J. L. – Lévesque et la Fondation de l’Institut universitaire en santé mentale Douglas.

 

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Le 16 août 2017