Par Diane Weidner
Recadrer l’enseignement et l’apprentissage en formation médicale pour aider nos résidents à exceller

De gauche à droite : Pr Tim Dubé, Dre Evelyn Constantin, Pr Carlos Gomez-Garibello

Pour le Bureau de la formation médicale postdoctorale (FMPD) de l’Université McGill, l’objectif est toujours le même : procurer aux futurs médecins les habiletés nécessaires pour répondre efficacement aux besoins de leurs patients en matière de santé.

La réforme pédagogique en cours vise à permettre à la formation médicale de suivre le pas de l’innovation et des avancées technologiques qui transforment le milieu médical partout dans le monde. Au Canada, cette évolution prend la forme d’une initiative intitulée La compétence par conception (CPC), pilotée par le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada (CRMCC), un nouveau modèle d’approche par compétences pour la formation en résidence et la pratique en spécialité qui sera mis en place partout au pays. Le 1er juillet 2017, les programmes de résidence en anesthésiologie et en otorhinolaryngologie – chirurgie cervico-faciale ont lancé cette nouvelle approche d’apprentissage. La transition de ces deux programmes vers la CPC a nécessité beaucoup de travail, de temps et de préparation. D’ici 2022, on prévoit que les programmes de résidence de toutes les disciplines seront passés au nouveau modèle.

Vers la mise en œuvre de la CPC à McGill

L’offre de formation médicale postdoctorale à l’Université McGill est l’une des plus importantes au pays, avec plus de 70 programmes de résidence agréés. Une transition de cette ampleur exigeait donc de longs préparatifs. Le Bureau de la FMPD a commencé à préparer l’arrivée du nouveau modèle pédagogique il y a plus de deux ans, sous la direction et avec le soutien du doyen David Eidelman et du vice-doyen à la formation médicale postdoctorale, Armand Aalamian. Grâce aux ressources et au personnel qu’ils ont affectés au projet, McGill est en mesure d’instaurer des stratégies fondées sur les compétences dans le but d’enrichir la formation en résidence. Le CRMCC a fourni un soutien précieux aux universités canadiennes pour faciliter la mise en œuvre de la CPC en leur accordant entre autres une subvention pédagogique pour former les professeurs qui aideront à préparer la transition des programmes vers l’approche par compétences.

Dre Evelyn Constantin et Dr Armand Aalamian

En février 2016, la Dre Evelyn Constantin a été embauchée au nouveau poste de vice-doyenne adjointe, FMPD, afin de superviser la mise en œuvre de l’approche par compétences en formation médicale postdoctorale. Le professeur adjoint Carlos Gomez-Garibello occupait déjà depuis 2015 le poste de responsable, Évaluation des apprentissages et des programmes à la FMPD, et le professeur adjoint Tim Dubé a intégré l’équipe en avril 2016 comme responsable de la conception et de l’harmonisation des programmes d’études. Une fois ces acteurs clés en place, le Comité de l’enrichissement de la formation médicale postdoctorale a été constitué. Présidé par la Dre Constantin, ce comité est composé de dirigeants pédagogiques et d’administrateurs mcgillois, ainsi que de représentants des résidents qui donnent leur avis sur la façon d’améliorer la formation médicale postdoctorale. L’équipe de mise en œuvre de l’approche par compétences comprend aussi d’autres membres importants, dont des experts en systèmes et technologies de l’information, ainsi que l’analyste de données Hanna Taleb et l’administratrice Adriana Martins. L’une des missions du Comité de l’enrichissement de la FMPD est d’appliquer une approche par compétences en formation médicale qui conduira à de meilleurs résultats dans les soins aux patients en intégrant les rôles CanMEDS et les principes du modèle centré sur l’apprenant, de l’apprentissage permanent, du bien-être des médecins et de la responsabilité sociale.

L’équipe de mise en œuvre de l’approche par compétences rencontre régulièrement les principaux groupes concernés – directeurs de programme, cliniciens enseignants, résidents, personnel administratif – afin de clarifier ce qu’implique la CPC et de discuter des pratiques exemplaires qui permettront une transition sans heurts vers le nouveau modèle pédagogique. « Il importe que tous les acteurs aient des attentes, des buts et un langage commun, pour que tous soient sur la même page », explique Carlos Gomez-Garibello. Tim Dubé ajoute que le Comité de l’enrichissement de la FMPD invite aussi des représentants de groupes de patients et d’autres groupes communautaires à siéger à ses sous-comités : « La responsabilité sociale est l’un des catalyseurs de la présente transformation. C’est très important de tenir compte de la perspective du patient et d’assurer une réciprocité. »

En tant que responsable de la CPC à la Faculté, la Dre Constantin est membre du comité national des responsables de l’approche par compétences en formation médicale, en compagnie de ses homologues des 16 autres facultés de médecine canadiennes. « Nous nous réunissons régulièrement pour discuter des questions pratiques de formation qui se posent localement, et pour nous informer mutuellement et tenir le CRMCC au courant des problèmes à régler », explique la Dre Constantin. « L’échange d’idées et de points de vue se fait en continu, à l’échelle du pays. »

Comment la CPC améliorera-t-elle la formation des résidents?

L’approche par compétences n’est pas un nouveau concept, mais elle gagne du terrain dans le monde entier et dans de nombreuses professions, où elle est employée pour améliorer l’apprentissage. Au Canada, les programmes de résidence en médecine de famille ont pris l’initiative il y a quelques années en passant à un cadre pédagogique axé sur les compétences, le Cursus Triple C. À McGill, avec le lancement de la CPC, les comités du programme d’études et de l’évaluation des apprentissages ont examiné les programmes de résidence pour déterminer comment créer un milieu d’apprentissage optimal offrant le meilleur soutien possible. « Dans la CPC, la responsabilité est davantage intégrée au processus », explique Tim Dubé. « Les résidents profiteront d’expériences d’apprentissage plus personnalisées qui leur donneront la marge de manœuvre pour acquérir les connaissances et les habiletés d’une manière qui correspond à leur progression. »

Traditionnellement, durant la résidence, la plus grande partie de l’apprentissage se fait en milieu de travail. Dans le modèle de CPC, les médecins résidents continueront de jouer un rôle important dans les milieux cliniques, et auront des compétences spécifiques à acquérir durant les quatre grandes étapes de leur transition vers la pratique. Quant à la durée de la formation, la trajectoire longitudinale ne changera pas et les résidents continueront de faire des stages, mais leur formation sera étayée par un programme d’évaluation beaucoup plus réfléchi.

Le passage à l’approche par compétences est une bonne occasion d’examiner la rétroaction que reçoivent les résidents, pour s’assurer qu’elle est utile et opportune. « Les résidents profiteront d’une rétroaction plus fréquente. Ils seront mieux informés de leur niveau actuel de compétence et de ce qu’ils doivent faire pour passer au prochain niveau, afin d’exceller dans l’acquisition des connaissances, habiletés et attitudes du médecin compétent », ajoute Carlos Gomez-Garibello.

Quel sera le rôle de la simulation dans le processus de la CPC?

Avec la complexité croissante du système de santé, la simulation donne un énorme coup de pouce aux apprenants, en leur permettant d’acquérir des compétences auxquelles ils sont peu exposés dans leurs milieux de stage. « Puisque les programmes de formation médicale postdoctorale ont déjà recours au Centre de simulation et d’apprentissage interactif Steinberg pour la formation professorale et pour enseigner aux résidents à enseigner », dit la Dre Constantin, « nous connaissons les avantages qu’offre la simulation. La prochaine étape consiste à approfondir la formation par simulation dans le cadre de la CPC pour chaque programme. »

Comme stratégie d’enseignement, la simulation se prête bien à toute sorte de situations. En remédiation, par exemple, la simulation pourrait jouer un rôle important en permettant de se concentrer sur l’amélioration de points précis. « La simulation fait partie intégrante de la formation. Elle crée des occasions d’interagir avec la technologie et aide les résidents à s’autoperfectionner », explique Carlos Gomez-Garibello. « Il existe différents niveaux de compétence, et l’apprentissage prend du temps. La simulation procure les conditions préalables au renforcement des capacités, pour que les résidents puissent faire preuve de leur compétence de façon authentique lorsqu’ils se trouveront dans un milieu réel. »

Une aventure enrichissante

« Pour notre équipe, cette aventure s’est révélée très enrichissante. Elle nous a donné des occasions extraordinaires de créer des réseaux en échangeant des idées et des cadres conceptuels au sein des programmes de la Faculté et avec des partenaires de partout au pays. La CPC est très prometteuse, c’est un nouveau modèle qui va nous permettre d’enrichir une formation qui était déjà excellente en permettant aux résidents et aux professeurs de collaborer plus proactivement », conclut la Dre Constantin.

De gauche à droite : Pr Tim Dubé, Adriana Martins, Dre Evelyn Constantin, Pr Carlos Gomez-Garibello, Hanna Taleb