Un comité recommande de nouvelles approches pour la dénomination des biens (tels que les édifices, les prix et les chaires dotées) afin d’accroître la visibilité des communautés traditionnellement marginalisées. 

Deux comités, formés pour évaluer les pratiques et formuler des lignes directrices relatives à la dénomination des édifices et autres espaces, des chaires dotées et des prix de la Faculté de médecine et des sciences de la santé (FMSS), ont conclu leurs travaux et soumis leurs recommandations au vice-principal et doyen David Eidelman, MDCM, et aux autres membres de la direction de la FMSS. 

Proposition étudiante 

Les comités spéciaux sur la commémoration et les dénominations de la FMSS se sont servi des conclusions du Rapport final du Groupe de travail sur les principes régissant la commémoration et les changements de nom (2018). Le Groupe de travail avait été formé par Christopher Manfredi, vice-principal exécutif et vice-principal aux études et a été coprésidé par Anja Geitmann, vice-principale (campus Macdonald) et doyenne de la Faculté des sciences de l’agriculture et de l’environnement et Robert Leckey, doyen de la Faculté de droit. L’un de ses objectifs consistait à formuler des recommandations concernant le changement de nom des équipes sportives Redmen de McGill, éventuellement rebaptisées Redbirds. 

Les comités de la FMSS s’inscrivent également dans un large processus d’autoréflexion, en partie lancé par une motion adoptée par l’Association des étudiant(e)s en médecine de l’Université McGill (MSS) en 2019. La MSS a demandé que la FMSS limite l’usage du nom de Sir William Osler sur le campus, compte tenu des propos racistes et sexistes que le diplômé mcgillois de médecine et ancien professeur a tenus de son vivant. En 2021, la Faculté a donc organisé un symposium réunissant des spécialistes locaux et internationaux afin de discuter de l’héritage de Sir Osler. C’est dans le but de donner suite à certaines des idées qui ont émané de ce symposium que le Dr Eidelman a formé les comités spéciaux et demandé à Annmarie Adams, Ph. D., professeure et ancienne directrice du Département de sciences sociales en médecine, ainsi qu’à Thomas Schlich, M.D., actuel directeur du Département, de les présider. 

Bilan 

Le premier comité, présidé par la Pre Adams, avait pour mission de recenser tous les biens nominatifs de la FMSS. « Avec l’aide de Fiona Kenney, doctorante en architecture, nous avons dressé la liste de tous les actifs nommés que nous avons pu trouver, des plus petits prix aux plus grands édifices », explique la Pre Adams. Le résultat a révélé une discrimination indéniable en faveur des hommes dans la dénomination des espaces et des prix de la Faculté (voir le graphique ci-dessous). Les exceptions touchent les écoles où l’on trouve traditionnellement une forte proportion de femmes au sein du corps professoral et du corps étudiant, par exemple l’École des sciences infirmières Ingram et l’École de physiothérapie et d’ergothérapie, qui comptent une grande proportion de désignations nominatives honorant des femmes. 

Graphique reproduit avec l’aimable autorisation de Fiona Kenney et du premier comité spécial sur la commémoration et les dénominations de la Faculté de médecine et des sciences de la santé

Il était difficile d’évaluer la diversité en termes de race, d’origine ethnique et d’autres indicateurs en se servant uniquement des noms et, à l’occasion, des photos. La Pre Adams avance tout de même qu’il est relativement raisonnable de conclure que la plupart des personnes honorées sont blanches. 

En ce qui concerne Sir Osler, le Comité a constaté qu’un total de neuf entités portent son nom, ce qui représente environ 4 % des bien nominatifs de la Faculté. La Pre Adams précise que si le chiffre peut sembler modeste, il ne dit pas tout : « C’est une donnée trompeuse, car les biens tels que la Bibliothèque Osler d’histoire de la médecine ont une grande importance, mais ne comptent que pour un seul élément de la liste. » Autre nuance à apporter : la Bibliothèque Osler porte ce nom parce qu’elle a été créée à partir de la collection personnelle de textes sur l’histoire de la médecine de Sir Osler, qu’il a léguée à McGill à sa mort en 1919. 

Le poids des noms 

Le deuxième comité, présidé par le Dr Schlich, est formé de représentants et représentantes des communautés traditionnellement exclues du choix des désignations nominatives à la Faculté, dont des membres autochtones du corps professoral, des membres de la communauté étudiante, des historiens et historiennes et d’autres parties prenantes. « C’était important de tenir compte de l’expérience et du point de vue des membres de ces communautés traditionnellement exclues du processus décisionnel, et de bénéficier des conseils de spécialistes en histoire et en patrimoine », explique le Dr Schlich. 

Ce deuxième comité avait pour mandat de préparer des lignes directrices pour la dénomination des biens respectant les principes d’équité, de diversité, d’inclusion et de justice sociale. « Il s’agit manifestement de principes auxquels on n’accordait pas autant d’importance par le passé, lorsque les décisions relatives à la dénomination ont été prises », note le Dr Schlich. Si certaines personnes prétendent que les noms ne valent pas toute cette peine, les conclusions du comité indiquent le contraire. « Les noms peuvent créer un sentiment d’appartenance ou d’exclusion, et ils façonnent réellement l’univers des gens, explique le Dr Schlich. Les noms peuvent être inspirants et ils peuvent être blessants. » Ce à quoi la Pre Adams ajoute : « Le choix d’un nom n’est jamais neutre. » 

Le Dr Schlich souligne que, compte tenu du rôle que joue la FMSS dans les soins aux patients, les désignations nominatives y ont une importance encore plus grande que dans les autres facultés : « La FMSS occupe une position unique dans l’écosystème mcgillois, compte tenu de ses étroites relations avec les patients et le personnel de la santé, deux groupes composés de personnes aux horizons divers. » La longue tradition médicale consistant à nommer des instruments et des maladies en l’honneur d’individus peut également poser problème. « C’est une pratique qui se transforme souvent en une sorte de culte du héros. Il faut y mettre un terme, car ces héros ne sont ni représentatifs, ni inclusifs, ni diversifiés, à quelque niveau que ce soit. » 

Prochaines étapes 

Le rapport produit par le deuxième comité fournit des recommandations relatives aux nouvelles désignations nominatives, en plus d’aborder les questions de retrait et de changement de ces désignations. Le rapport exhorte la FMSS à sélectionner les désignations en admettant et en incluant les noms de personnes issues de communautés traditionnellement marginalisées, et en s’efforçant de mieux représenter la composition actuelle de la Faculté. Il recommande également de procéder à de vastes consultations durant les prises de décisions, tout en accordant davantage d’importance à l’effet que les noms auront sur la société. 

Le rapport encourage par ailleurs le recours aux noms autochtones, à la fois pour améliorer la représentation autochtone à McGill et pour signifier que la FMSS reconnaît qu’elle est située sur un territoire qui a longtemps servi de lieu de rencontre et d’échanges entre les peuples autochtones. La FMSS est également dans l’obligation de corriger la disparité hommes-femmes en plus de prendre en considération la classe sociale, l’orientation sexuelle, la différence corporelle et les handicaps dans ses futurs processus de dénomination. 

Le rapport suggère aussi de sélectionner les désignations nominatives en l’honneur d’endroits, d’événements ou d’idées, une pratique courante dans les cultures autochtones : « En mettant l’accent sur des individus uniquement, on manque à l’appréciation du travail d’équipe et de la collaboration que l’on célèbre dans les sciences de la santé », y lit-on.  

Ultimement, le choix final d’une désignation nominative et la décision de retirer ou de changer une désignation reviennent au Conseil des gouverneurs de l’Université, et non à la Faculté. La présidente et le président des deux comités espèrent que le travail accompli par la Faculté incitera la formation d’un comité panuniversitaire qui adoptera leurs propres recommandations ainsi que celles du rapport produit par le Groupe de travail en 2018. 

Le Dr Eidelman est satisfait des observations et recommandations des comités et est impatient de s’attaquer aux prochaines étapes, en collaboration avec l’Université : « Notre Faculté a à cœur de créer des milieux accueillants et sûrs pour nos apprenants et apprenantes, les membres de notre corps professoral et les membres de notre personnel, de même que pour les patients et le personnel de nos établissements partenaires. Ces recommandations nous aideront à revoir notre façon de faire dans le choix des désignations nominatives, de manière à nous assurer que nous écoutons ce que les groupes traditionnellement marginalisés ont à dire à ce sujet. Elles constituent une étape majeure dans notre démarche visant à créer une communauté inclusive et reflétant l’ensemble de ses membres. » 

Liens connexes : 

Final Report of the McGill Working Group on Principles of Commemoration and Renaming (décembre 2018)  

Décision concernant le nom Redmen 

Le poids des mots : Créer à la Faculté de médecine et des sciences de la santé un milieu inclusif et sûr où règnent le respect et la bienveillance