Dans une étude publiée dans Nature, des chercheurs de l’IR-CUSM se penchent sur la manière dont les poumons composent avec les microbes envahissants
Les êtres humains respirent environ 11 000 litres d’air quotidiennement, ce qui leur fournit l’oxygène nécessaire à la vie. Toutefois, la respiration permet aussi à des microorganismes, à des particules ou à des polluants d’avoir accès aux poumons. Comment les poumons s’adaptent-ils à divers problèmes environnementaux pour assurer l’élimination de microbes envahissants, tout en préservant leurs fonctions essentielles?
Dans un article publié récemment dans Nature, des chercheurs de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) se sont penchés sur divers aspects de cette question dans leur article intitulé « Neonatal imprinting of alveolar macrophages via neutrophil-derived 12-HETE » ([traduction] L’empreinte néonatale des macrophages alvéolaires laissée par l’acide 12-hydroxyeicosatétraénoïque [12-HETE] dérivé des neutrophiles). Pour la première fois, l’équipe a été en mesure d’établir une distinction entre les mécanismes cellulaires et les mécanismes moléculaires vitaux dans le développement embryonnaire, mécanismes qui assurent la fonction pulmonaire tout au long de la vie d’un organisme.
« Dès notre première respiration, nos poumons sont remplis d’un sous-ensemble de cellules immunitaires appelées macrophages alvéolaires (MA), qui veillent sur nos voies respiratoires, explique le professeur et auteur principal de l’étude, Maziar Divangahi, Ph. D., spécialiste de l’immunologie pulmonaire et scientifique senior au Programme de recherche translationnelle sur les maladies respiratoires à l’IR-CUSM. Les macrophages alvéolaires jouent un rôle important pour ce qui est d’induire des réponses immunitaires visant à tuer les pathogènes et à combattre l’inflammation pour limiter les dommages aux poumons. »
Bien qu’ils soient produits dans l’embryon, les macrophages alvéolaires maintiennent leur capacité à se renouveler et à continuer à protéger les poumons la vie durant. Jusqu’à la publication de l’étude dont il est ici question, on ne savait pas grand-chose de la manière dont les MA peuvent maintenir cette longévité.
« Notre laboratoire a par le passé démontré comment les fonctions des macrophages pulmonaires, comme les MA, sont régulées dans la défense de l’hôte contre les infections pulmonaires d’origine bactérienne ou virale, commente l’auteur principal de l’étude, Erwan Pernet, chercheur boursier postdoctoral travaillant sous la direction du professeur Divangahi à l’époque de la réalisation de cette étude. Toutefois, dans cette étude, nous avons pu révéler les processus néonataux qui façonnent la longévité des MA. »
L’équipe de chercheurs s’est concentrée sur le rôle des lipides bioactifs appelés médiateurs lipidiques de l’hôte. Ils ont découvert avec surprise que la suppression d’un médiateur lipidique appelé acide 12-hydroxyeicosatétraénoïque (12-HETE) avait entraîné une réduction importante du nombre de MA dans les poumons des adultes. Le collaborateur Jun Ding, Ph. D., de l’IR-CUSM, a effectué l’analyse du profil transcriptomique, en mesurant les niveaux d’ARN des gènes dans les macrophages alvéolaires. Ses travaux ont révélé que l’acide 12-HETE est nécessaire à l’autoprolifération des MA et à la prévention de leur sénescence. En collaboration avec Bryan Yipp, M.D., de l’Université de Calgary, et avec Ajitha Thanabalasuriar, Ph.D., de l’École des sciences biomédicales de l’Université McGill, l’équipe a par la suite découvert que les neutrophiles néonataux étaient la source principale de production d’acide 12-HETE et qu’ils étaient nécessaires au maintien de la capacité de prolifération des MA. Par la suite, le collaborateur Luis Barreiro, Ph. D., de l’Université de Chicago, a découvert que la programmation épigénétique des MA néonataux se produisait par l’intermédiaire de l’acide 12-HETE dérivé des neutrophiles.
« Nos résultats mettent en évidence la complexité des interactions qui se produisent au début du cycle de la vie entre les cellules immunitaires. L’acide 12-HETE dérivé des neutrophiles pendant le début du cycle de la vie est essentiel à l’autoprolifération des macrophages alvéolaires, poursuit le professeur Divangahi, qui est titulaire de la chaire Strauss sur les maladies respiratoires et professeur de médecine à l’Université McGill, aussi directeur adjoint des laboratoires Meakins-Christie et directeur adjoint du Centre international de la tuberculose de l’Université McGill. La réduction du nombre de MA chez les personnes plus âgées, qui avait accru la susceptibilité aux infections ou à l’inflammation pulmonaires, a une incidence importante sur l’immunité contre les maladies infectieuses et sur la santé pulmonaire de la population vieillissante. »
À propos de l’étude
Lire la publication dans Nature.
Les auteurs tiennent à remercier le personnel de la Plateforme d’histopathologie de l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill de son soutien technique, les Instituts de recherche en santé du Canada, le Fonds de recherche du Québec – Santé ainsi que la Fondation Strauss.