La découverte de mutations du gène ACTL6B renseigne sur le développement du cerveau
Source : Salle de Presse McGill
En étudiant les mutations d’un gène qui participe au développement du cerveau, une équipe internationale dirigée par des chercheurs de l’Université McGill et du Centre de recherche du CHU Sainte-Justine a mis au jour deux nouvelles maladies neurodéveloppementales.
Les premiers indices menant à cette découverte ont été trouvés après que des médecins de Québec aient échoué à cerner la cause des convulsions et de déficits neurodéveloppementaux chez deux enfants d’une même fratrie. En désespoir de cause, les parents des enfants se sont tournés vers Carl Ernst, de l’Institut universitaire de santé mentale Douglas à Montréal.
Le professeur Ernst, qui enseigne au Département de psychiatrie de l’Université McGill, et son équipe ont « reprogrammé » des cellules de peau prélevées chez les deux bambins pour les transformer en cellules souches. Ils ont ensuite incité ces cellules souches pluripotentes induites (CSPI) à se différencier en neurones, qu’ils ont comparés à des neurones sains, pour constater que les neurones issus de la reprogrammation ne s’étaient pas développés normalement. Des analyses plus poussées ont permis de trouver une cause possible: la présence d’une mutation du gène ACTL6B – un régulateur épigénétique participant au développement neuronal – chez les membres de la famille touchée.
À la même époque, le Dr Philippe Campeau, généticien au Centre de recherche du CHU Sainte-Justine et professeur à l’Université de Montréal, étudiait lui aussi les mutations d’ACTL6B cernées dans deux familles, dans le cadre d’une étude du génome de patients épileptiques menée par ses collègues, les Drs Jacques Michaud et Elsa Rossignol. Avec l’aide de Julie Lessard, experte d’ACTL6B à l’Institut de recherche en immunologie et en cancérologie, le Dr Campeau cartographiait les effets des mutations d’ACTL6B sur les interactions entre protéines. Or, il s’est aperçu qu’il étudiait les mêmes mutations que le professeur Ernst en assistant à une conférence sur le gène ACTL6B donnée par ce dernier; les deux chercheurs ont alors décidé de conjuguer leurs efforts.
En communiquant avec d’autres scientifiques dans plus de 10 pays, ils ont vite trouvé des cas isolés semblables partout dans le monde.
« À partir de ce moment, nous avons su que nous avions affaire à une nouvelle maladie génétique », dit Scott Bell, doctorant au laboratoire d’Ernst et auteur principal d’une étude détaillant cette découverte dans l’American Journal of Human Genetics.
À mesure qu’ils trouvaient d’autres porteurs de mutations d’ACTL6B, les chercheurs ont remarqué que ces personnes se répartissaient dans deux groupes différents : dans le premier groupe, les porteurs de mutations récessives (touchant les deux copies du gène ACTL6B) étaient atteints d’épilepsie et de troubles neurodéveloppementaux, alors que dans le deuxième, les patients, dont une seule copie du gène était mutée, avaient également des problèmes neurodéveloppementaux, mais n’étaient pas atteints d’épilepsie. Ils souffraient en outre d’un retard de langage et de stéréotypies manuelles comme on en observe en présence du syndrome de Rett (causé par des mutations d’un autre régulateur épigénétique).
« C’était très étonnant, dit Justine Rousseau, associée de recherche du Dr Campeau qui dirigeait l’étude des interactions entre protéines. Cette observation apporte une preuve très solide de l’existence de deux maladies neurologiques distinctes, causées par des mutations dans le même gène. »
Grâce à de nouveaux outils de recherche, comme les CSPI et la technologie CRISPR de modification génétique, les chercheurs ont pu montrer que les mutations d’ACTL6B entraînent le dérèglement d’autres gènes nécessaires au développement des dendrites, des prolongements du corps cellulaire des neurones essentiels à la communication entre cellules cérébrales.
Selon le professeur Ernst, ces travaux démontrent que les nouvelles technologies facilitent l’étude des maladies neurodéveloppementales rares.
« Nous sommes très heureux des résultats de nos travaux, parce que les familles touchées par cette maladie ont pour la première fois un moyen de comprendre les problèmes qui les affligent, affirme M. Ernst. Les outils dont nous nous sommes servis fournissent d’autres éléments de preuve du rôle vital du gène ACTL6B dans le développement du cerveau. Il faut poursuivre l’exploration de ce gène. »
Cette étude a été financée par le Fonds de recherche en santé du Québec, le gouvernement de l’Indonésie, le Conseil mexicain de la Science et de la Technologie, Mitacs, Génome Canada et Génome Québec, l’Agence japonaise de développement de la recherche en médecine (AMED), le ministère japonais de l’Éducation, de la Culture, des Sports, des Sciences et de la Technologie (MEXT), l’Agence japonaise de la Science et de la Technologie (JST), le ministère japonais de la Santé, du Travail et du Bien-être (MHLW), la Fondation Takeda pour la science et les Instituts de recherche en santé du Canada.
L’article « Mutations in ACTL6B cause neurodevelopmental deficits and epilepsy and lead to loss of dendrites in human neurons » a été publié dans l’American Journal of Human Genetics par Scott Bell et ses collègues.
Fondée à Montréal, au Québec, en 1821, l’Université McGill est l’une des principales universités canadiennes. McGill compte deux campus, 11 facultés, 13 écoles professionnelles, 300 programmes d’études et près de 40 000 étudiants, dont plus de 9 700 aux cycles supérieurs. McGill accueille des étudiants originaires d’environ 150 pays, ses 12 500 étudiants étrangers représentant 30 pour cent de sa population étudiante. Environ 20 pour cent des étudiants de McGill indiquent que leur langue maternelle est le français.
Le Centre de recherche du CHU Sainte-Justine est un établissement phare en recherche mère-enfant affilié à l’Université de Montréal. Axé sur la découverte de moyens de prévention innovants, de traitements moins intrusifs et plus rapides et d’avenues prometteuses de médecine personnalisée, il réunit plus de 200 chercheurs, dont plus de 90 chercheurs cliniciens, ainsi que 500 étudiants de cycles supérieurs et postdoctorants. Le centre est partie intégrante du Centre hospitalier universitaire Sainte-Justine, le plus grand centre mère-enfant au Canada et le deuxième centre pédiatrique en importance en Amérique du Nord. Détails au recherche.chusj.org.
Justin Dupuis
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Le 26 avril 2019