McGill Salle de Presse
L’utilisation des antidépresseurs en Amérique du Nord a augmenté au cours des deux dernières décennies. Cette tendance serait attribuable au fait que les médecins de soins primaires prescrivent des antidépresseurs pour des indications autres que la dépression, y compris des indications non approuvées (utilisation hors indication) et non évaluées par les organismes de réglementation.
Dans le cadre d’une étude présentée dans le numéro du 24 mai de la revue JAMA, Jenna Wong, étudiante au doctorat au département d’épidémiologie, de biostatistique et de santé au travail, et ses collègues ont analysé les indications thérapeutiques des antidépresseurs et ont évalué les tendances en matière de prescription d’antidépresseurs pour traiter la dépression.
Les chercheurs ont examiné les données d’un système de dossiers médicaux et de prescription électronique utilisé par des médecins de soins primaires rémunérés à l’acte dans des pratiques communautaires situées près de deux grands centres urbains du Québec. L’étude portait sur des ordonnances d’antidépresseurs de toutes les classes, à l’exception des inhibiteurs de la monoamine-oxydase, rédigées pour des adultes entre janvier 2006 et septembre 2015. Les médecins qui ont participé à cette étude devaient sélectionner au moins une indication thérapeutique par ordonnance au moyen d’un menu déroulant contenant la liste des indications ou entrer l’indication ou les indications à la main.
Durant la période de l’étude, 101 759 ordonnances d’antidépresseurs (6 % de toutes les ordonnances) ont été rédigées par 158 médecins pour 19 734 patients. L’indication dépression figurait sur seulement 55 % des ordonnances d’antidépresseurs. Les médecins ont aussi prescrit des antidépresseurs pour traiter des troubles anxieux (18,5 %), de l’insomnie (10 %), des douleurs (6 %) et des troubles paniques (4 %). Dans 29 % de toutes les ordonnances d’antidépresseurs (66 % des ordonnances rédigées pour autre chose que la dépression), les médecins ont prescrit un médicament pour une utilisation hors indication, en particulier l’insomnie et la douleur. Les médecins ont également prescrit des antidépresseurs pour traiter plusieurs affections non indiquées dans la monographie, y compris la migraine, les symptômes vasomoteurs associés à la ménopause, le trouble de déficit de l’attention/hyperactivité et des troubles digestifs.
« Les résultats indiquent que l’existence d’une ordonnance d’antidépresseur n’est pas synonyme de traitement de la dépression et ils mettent en évidence la nécessité d’évaluer les preuves appuyant l’utilisation des antidépresseurs hors indication », ont conclu les auteurs.
Cette recherche a été financée par une bourse d’études supérieures du Canada Vanier (Instituts de recherche en santé du Canada) et une bourse Max E. Binz (Faculté de médecine, Université McGill).
Treatment Indications for Antidepressants Prescribed in Primary Care in Quebec, Canada, 2006-2015, Jenna Wong; Aude Motulsky; Tewodros Eguale; David L Buckeridge; Michal Abrahamowicz; and Robyn Tamblyn,JAMA
DOI: http://jama.jamanetwork.com/article.aspx?doi=10.1001/jama.2016.3445
Le 25 mai 2016