Une version reformulée et brevetée d’un médicament générique bien connu pourrait s’avérer être un moyen rapide, sûr et rentable d’accélérer le rétablissement et de prévenir les hospitalisations.
La lutte contre la COVID-19 doit être menée sur plusieurs fronts. L’adhésion du public aux mesures de lutte contre l’infection est essentielle, tout comme la recherche pour développer un vaccin. Mais, même lorsqu’un vaccin sera au point, les cas ne disparaitront pas et de nombreux patients auront encore besoin d’un traitement. En ce sens, la reconversion de médicaments pourrait être un moyen rapide, sûr et rentable de développer de nouvelles thérapies pour la COVID-19. À l’automne, un vaste essai clinique randomisé de phase III parrainé par l’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) commencerait à tester l’efficacité d’un médicament générique reformulé chez des patients ambulatoires positifs à la COVID-19 pour atténuer l’inflammation pulmonaire grave causée par le virus SARS-CoV-2 et, par conséquent, pour réduire les admissions à l’hôpital. La dapsone est un antibactérien oral sûr et abordable, utilisé depuis des décennies, qui possède des propriétés anti-inflammatoires et immunomodulatrices bien reconnues contre le paludisme, le lupus, le VIH et de nombreuses autres infections inflammatoires.
« Alors que des stratégies agressives d’atténuation sont mises en œuvre pour ralentir la propagation du SARS-CoV-2, nous devons également concentrer nos efforts sur le développement et la mise en œuvre de médicaments candidats scientifiquement valables en utilisant des essais contrôlés randomisés de haute qualité », déclare le Dr Jean Bourbeau, chercheur principal à l’IR-CUSM, pneumologue au Centre universitaire de santé McGill et chercheur principal de l’étude. « La reconversion d’un médicament existant présente de nombreux avantages. Les propriétés métaboliques, pharmacocinétiques et toxicologiques de la dapsone sont bien documentées. Nous comprenons donc son mécanisme d’action, la façon dont elle est absorbée par l’organisme et comment elle pourrait minimiser le processus inflammatoire dans les poumons et réduire les complications de la COVID-19 qui entraînent des admissions à l’hôpital, des intubations, des soins intensifs et la mortalité. Nous connaissons également ses effets secondaires, ce qui pourrait nous aider à éviter de la prescrire aux patients à risque ».
La reconversion d’un médicament existant pour une nouvelle utilisation présente l’avantage supplémentaire de permettre aux chercheurs de passer directement à la phase III d’un essai clinique et d’évaluer l’efficacité et la sécurité de la reformulation avec un investissement minimal en temps et en argent. De plus, puisqu’il n’y a pas de dépenses de recherche et développement, les médicaments génériques coûtent considérablement moins cher que les nouveaux médicaments sur ordonnance.
L’essai intitulé Dapsone Coronavirus SARS-CoV-2 Trial (DAP-CORONA) sera randomisé, en triple aveugle, contrôlé par placebo, parallèle et multicentrique et évaluera l’efficacité et la sécurité d’une nouvelle version de la dapsone développée et brevetée par Pulmonem, une entreprise canadienne en démarrage dans le secteur des biotechnologies.
La nouvelle version du médicament sera administrée aux premiers stades de la maladie chez des adultes symptomatiques en consultation externe pour atténuer ce que l’on appelle la tempête de cytokines, déclenchée par la COVID-19.
« Les cytokines sont des protéines produites par les globules blancs qui aident à coordonner la réponse immunitaire de l’organisme. Mais parfois, le système immunitaire réagit de façon exagérée et des niveaux excessifs de cytokines sont libérés, ce qui entraîne une hyperinflammation. En raison de ses propriétés anti-inflammatoires, immunomodulatrices et immunosuppressives, la dapsone agit sur l’adhérence des cellules immunitaires appelées neutrophiles pour empêcher la libération de cytokines », explique le Dr Bourbeau, qui est également professeur à l’Université McGill. « En administrant le médicament dès l’apparition des symptômes, nous espérons atténuer l’inflammation pulmonaire qui est la cause la plus fréquente de l’aggravation des symptômes et des complications nécessitant une hospitalisation ».
L’étude DAP-CORONA devrait commencer à la fin du mois de septembre. Plus de 2 000 patients symptomatiques en consultation externe – des adultes âgés de 70 ans et plus et des adultes plus jeunes présentant au moins une comorbidité à haut risque – seront recrutés dans sept centres au Canada et aux États-Unis. L’équipe internationale de chercheurs dirigée par le Dr Bourbeau utilisera une nouvelle plateforme pour dépister, obtenir le consentement et surveiller à distance l’efficacité et l’innocuité des participants. Les résultats devraient être disponibles avant la fin 2020.
Selon le Dr Bourbeau, les agents immunomodulateurs tels que la dapsone pourraient s’avérer être une avancée significative dans le traitement de la COVID-19.
« Avec la nécessité de prévenir les complications conduisant à des admissions à l’hôpital et l’absence de traitements efficaces prouvés pour les patients externes souffrant de la COVID-19, la démonstration que la dapsone présente un bénéfice clinique net devrait être une priorité de santé publique ».
Cette recherche clinique sera partiellement soutenue par la Fondation du Centre universitaire de santé McGill.
« Notre fondation est déterminée à aider la communauté scientifique à trouver un remède pour la COVID-19 et à mettre fin à cette pandémie. Elle s’est engagée à recueillir des fonds pour aider à soutenir cette étude, qui s’inscrit dans notre mission de transformer les soins de santé et de changer le cours de la vie et de la médecine par l’innovation », déclare Julie Quenneville, présidente de la Fondation du CUSM. « Garantir la sécurité et l’efficacité des nouvelles interventions thérapeutiques telles que celle-ci fournira à nos médecins les outils dont ils ont besoin pour lutter contre la COVID-19 et sauver des vies ».
L’Institut de recherche du Centre universitaire de santé McGill (IR-CUSM) est un centre de recherche de réputation mondiale dans le domaine des sciences biomédicales et de la santé. Établi à Montréal, au Canada, l’Institut, qui est affilié à la faculté de médecine de l’Université McGill, est l’organe de recherche du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) – dont le mandat consiste à se concentrer sur les soins complexes au sein de sa communauté. L’IR-CUSM compte plus de 460 chercheurs et près de 1 300 étudiants et stagiaires qui se consacrent à divers secteurs de la recherche fondamentale, de la recherche clinique et de la recherche en santé évaluative aux sites Glen et à l’Hôpital général de Montréal du CUSM. Ses installations de recherche offrent un environnement multidisciplinaire dynamique qui favorise la collaboration entre chercheurs et tire profit des découvertes destinées à améliorer la santé des patients tout au long de leur vie. L’IR-CUSM est soutenu en partie par le Fonds de recherche du Québec – Santé (FRQS). ircusm.ca
La Fondation du Centre universitaire de santé McGill (CUSM) recueille des fonds pour soutenir l’excellence des soins aux patients, de la recherche et de l’enseignement au CUSM. Notre fondation a créé un Fonds d’urgence COVID-19 pour permettre au CUSM de lancer rapidement des projets de recherche essentiels pour mettre fin à ce virus et pour soutenir les efforts inlassables du personnel de notre hôpital face à cette pandémie. Avec votre aide, nous prenons des mesures immédiates et nous nous concentrons sur la prévention et la guérison de la maladie.
Personne-ressource pour les médias
Gilda Salomone
Centre universitaire de santé McGill
C: 514-377-4996
Le 2 septembre 2020